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chronique

Tous compétitifs ?

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par Michaël Fœssel, professeur de philosophie à l’école Polytechnique.
publié le 7 février 2014 à 20h36

L’objectif du supposé tournant «social-démocrate» de la politique française est clair : la généralisation de l’impératif de compétitivité. Une meilleure compétitivité, dit-on, ce sont des prix plus attractifs, donc un avantage concurrentiel, des embauches et un gain final pour le consommateur. Au-delà de ce cercle magique, il y a des questions simples à poser. S’est-on, par exemple, demandé s’il y a un sens à universaliser la compétitivité ?

Il fut un temps où tous les politiciens de gauche (sociaux-démocrates compris) connaissaient par cœur les premières pages du Capital. On leur a, parfois à juste titre, reproché de les réciter à la manière d'un dogme. Dans ces pages, Marx s'interroge sur les gains de productivité liés à l'invention de la machine à tisser à vapeur. Cette technique divise par deux le temps de travail jusque-là nécessaire pour transformer le fil en tissu. On aurait donc pu s'attendre à ce que la quantité de valeur du tissu produit par cette nouvelle machine soit elle-même divisée par deux. Est-ce ce qui arrive ? Nullement, explique Marx, et cela parce que les fabricants de tissu qui ne disposent pas de la machine à vapeur sont soumis à une alternative implacable : s'adapter ou disparaître. Dès l'instant où un gain de productivité est acquis, il devient le critère normal qui s'impose à l'ensemble du marché.

On ne reste donc jamais compétitif très longtemps. Même si l’augmentation de productivité est constante, la valeur demeure fixe. Pour Marx, cette l