La campagne des élections européennes qui s’ouvre va être la plus brève et la plus funèbre que nous ayons connue depuis l’instauration de l’élection du Parlement européen au suffrage universel direct. Elle commencera en réalité au lendemain des vacances de Pâques et ne durera donc que quatre semaines, encore raccourcies par deux longs week-ends fériés. Ce sera cependant suffisant pour entendre s’élever un concert fracassant de réquisitoires enchevêtrés, de protestations stridentes, de reproches acerbes.
Nous allons assister au purgatoire de l’Europe. La moitié des Français s’abstiendra, l’autre moitié critiquera Bruxelles. Dans le reste de l’Europe, on enregistrera le même mouvement. La plus belle idée française depuis la Libération, celle de Robert Schuman et Jean Monnet, va subir le supplice du pilori.
Marine Le Pen pavoisera, Jean-Luc Mélenchon s’enfiévrera. Ces temps-ci, on s’interroge beaucoup, non sans raison, sur la crise de l’identité française. Après le 25 mai, on s’interrogera aussi sur la crise de l’identité européenne.
C'est un fait, un paradoxe, une injustice : l'Europe affronte un immense désamour chez les peuples qui la compose. Bruxelles est dépeint comme un repaire obscur ou se trament directives faustiennes et règlements tatillons. Démocratie introuvable, solidarité rétive, bureaucratie proliférante, ouverture à tous vents, despotismes infinis sur les peuples malheureux, la représentation de l'Europe finit par ressembler aujourd'hui à la première page du D