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Libération

La vengeance de la France d’en bas

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publié le 4 juin 2014 à 18h46

Il y a pire encore que les 25% de suffrages obtenus par Marine Le Pen aux élections européennes, c’est ce que le scrutin dit, mesure et confirme de l’état actuel de la société française. Au-delà du spectaculaire succès de l’extrême droite, on constate, en effet, une sorte de sécession politique et morale de la France d’en bas. Les chiffres sont accablants, les ressorts sont plus qu’inquiétants. 43% des ouvriers qui ont voté l’ont fait en faveur d’un nationalisme xénophobe et démagogique. 38% des employés, 37% des chômeurs ayant rempli leur devoir électoral les imitent. Chez les jeunes de moins de 25 ans se rendant aux urnes, près de la moitié vote en faveur du Front national. Ce n’est pas une découverte, mais c’est une accentuation, une accélération, une cristallisation. L’électorat traditionnel de la gauche a viré très à droite, plus à droite que jamais à travers toute l’histoire électorale.

Dans les années 60, la classe ouvrière, la fraction des employés qui lui étaient la plus proche et les jeunes constituaient les gros bataillons d’un Parti communiste qui rassemblait encore quelque 22% des votes. Aujourd’hui, leurs petits-enfants votent Front national. Quant au pauvre Parti socialiste, il n’a plus la moindre assise populaire. Les lambeaux de sa grande armée électorale forment le carré parmi les classes moyennes. Le 25 mai, la France modeste s’est abstenue ou a tourné le dos à la gauche. La France d’en bas s’est vengée.

Bien sûr, rien ne prouve que ce qui vient d’arriver se