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TRIBUNE

Gauche, la bataille contre l’hégémonie droitière

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par Gaël Brustier, docteur en sciences politiques, Fabien Escalona, Attaché temporaire d'enseignement et de recherche (Ater) à Science Po Grenoble et Mathieu Vieira, Ater à Sciences Po Lille
publié le 18 juin 2014 à 18h06

Parmi les réactions suscitées par la performance du Front national aux élections européennes, un argumentaire classique a trouvé une occasion d'être redéployé. Il consiste à dénoncer le délaissement par la gauche du strict cadre de l'Etat-nation, du peuple dans ses profondeurs et de ses préoccupations légitimes (dont l'immigration). Ce discours a le double avantage d'apparaître moins déconnecté du réel que la rhétorique antifasciste traquant le retour des «heures les plus sombres de notre histoire», et de proposer une explication simple et séduisante des échecs de la gauche pour des franges assez diverses de ce camp.

Il s’agit là d’une interprétation sociale conservatrice de la situation politique de notre pays. Réfugiés dans le «verbalisme républicain», méfiants envers les expressions du libéralisme culturel, ses porte-parole voient dans le «progressisme sociétal» la raison qui aurait empêché la gauche de répondre au désarroi des classes populaires. Après les tabous de l’économie de marché et de la sécurité, il faudrait donc désormais en finir avec les questions de société pour sortir la gauche de la crise dans laquelle elle se trouve empêtrée depuis une trentaine d’années. On notera que les partisans de cette ligne restent (volontairement ?) silencieux quant à la signification à donner à ce retour à la question sociale, mais aussi sur d’autres renoncements de la gauche qui ne semblent pas les intéresser : l’éducation populaire, la transformation du travail, les loi