La mise en examen pour trafic d’influence d’un ancien président de la République, de son avocat, d’un magistrat de haut rang révèle les mœurs de toute une époque de la justice. Un homme politique ayant des relations anciennes et constantes avec un juge, comme il en a avec des hauts fonctionnaires, des préfets : cela a toujours fait partie du cursus de l’ascension vers le pouvoir. De tout temps, il y a eu des juges misant sur des hommes politiques et la justice fut le théâtre, pendant des dizaines d’années, de la constitution de ces écuries de diverses obédiences. La filiation des hommes du parquet était la plus visible, mais l’influence s’exerçait aussi sur les juges du siège. Cette affaire doit marquer une évolution majeure dans l’indépendance de la justice.
La mue est douloureuse. La gauche a du mal à intégrer le changement culturel qu’elle a introduit en assurant l’indépendance du parquet, des juges et celle des policiers. L’épisode du mois de février, qui vit le gouvernement hésiter à avouer qu’il était au courant des investigations policières, était alimenté par la peur d’être accusé d’avoir influencé l’enquête. L’accusation d’incompétence du gouvernement au prétexte qu’il n’était pas informé, avant février, reflète les mauvaises manières de ce passé où les procès-verbaux d’interrogatoire étaient le soir même sur le bureau du ministre de l’Intérieur et où des juges d’instruction, chargés d’affaires délicates, venaient toucher leurs primes dans les bureaux du ministre. La