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Libération

La foule parisienne attendue pour un dernier hommage à Jaurès

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Le député est mort depuis quatre jours et, en France, tout a changé. Ses amis socialistes ont rallié la défense nationale et sa dépouille, avant son retour en terre natale, est portée aujourd’hui à la Concorde.
publié le 3 août 2014 à 20h16

Jaurès est enterré aujourd'hui : étrange cérémonie, jour de tristesse et d'ambiguïté. L'homme de la paix s'en va au milieu d'un pays en guerre ; l'homme du socialisme sera salué par ceux-là mêmes qui ont suggéré son assassinat, ces nationalistes qui l'appelaient il y a trois jours encore «Herr Jaurès» ; Barrès lui-même sera présent ; les socialistes, ses camarades, qui devaient prévenir la guerre à ses côtés, ont finalement rallié le camp de la défense nationale ; Léon Jouhaux, le leader de la CGT, son allié dans la lutte pour la paix, prononcera un discours d'hommage où il annoncera qu'il soutient la guerre. Comme le dit déjà Séverine, la grande journaliste, son amie de toujours, cet enterrement pourrait bien signifier la deuxième mort de Jaurès…

Somnambule. Ses amis se réuniront près de chez lui, au carrefour de la rue Henri-Martin et de la rue de la Pompe. On ira jusqu'à la Concorde, la bien nommée au moment où Poincaré parle d'Union sacrée, et son corps sera ensuite ramené à Albi, dans sa «petite patrie» du Tarn. On attend peu de monde. Pour une raison simple : Jaurès est mort depuis quatre jours et tout a changé. La mobilisation a vidé Paris et les esprits sont ailleurs. La France était en paix. Elle est en guerre. L'armée allemande attaque le Luxembourg et la Belgique, pays neutres. Bientôt, elle affrontera l'armée française. Dans l'exaltation patriotique parfois, plus souvent dans une sorte de gravité résignée, chacun se r