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Libération
TRIBUNE

L’autisme constitutionnel de la Ve République

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publié le 3 septembre 2014 à 18h06

Une Constitution est «la garantie de la liberté d'un peuple», écrivait Benjamin Constant. Celle de 1958 est une garantie de la liberté des gouvernants. Une Constitution est un ensemble de canaux permettant la communication entre gouvernés et gouvernants. Celle de 1958 a bouché ces canaux. Son avènement sous les bruits de bottes et sans Assemblée constituante fut peu conforme aux exigences démocratiques les plus élémentaires ; son fonctionnement a moins répondu au principe de la séparation des pouvoirs qu'à celui, énoncé par le général de Gaulle en 1964, selon lequel «l'autorité indivisible de l'Etat est confiée tout entière au président par le peuple qui l'a élu, […] il n'en existe aucune autre, ni ministérielle, ni civile, ni militaire, ni judiciaire, qui ne soit conférée et maintenue par lui» ; son aboutissement aujourd'hui, en 2014, est une fracture profonde du lien politique, une crise de confiance entre gouvernants et gouvernés. La Ve République a épuisé la démocratie : le président de la République ne répond plus et la société ne se reconnaît plus dans ses institutions. D'où une situation d'autisme constitutionnel.

Les premiers symptômes sont apparus sous le premier septennat de Mitterrand. Quand, en 1983, deux ans après son élection, il prend la décision de mener une autre politique économique que celle sur laquelle il a été élu - le fameux tournant de la rigueur -, il ne cherche pas à faire valider par le peuple ce changement. Et surtout,