La crise de notre système politique impose un big bang institutionnel. Mais elle exige aussi une réflexion critique sur les ambiguïtés d’une culture républicaine qui a perpétué les institutions d’un Etat d’inspiration napoléonienne.
Pour les républicains opportunistes des années 1880, la République, sous couvert des valeurs de la Révolution, établissait une cohérence ontologique entre la Nation, l’Etat, l’Administration : la Nation, essence métahistorique, source unique d’une souveraineté déléguée aux élus du suffrage universel (masculin), l’Etat, vecteur de cette souveraineté, dont l’Administration assurait la bonne marche. Persuadés de parachever la Révolution par les vertus émancipatrices d’une instruction populaire généralisée et par la substitution d’une «élite de l’esprit» à l’aristocratie de naissance, ils cautionnèrent, par crainte d’une restauration monarchique, les structures centralisées et la verticalité autoritaire de l’Etat recueilli du Second Empire.
Ils mirent en place parallèlement un système scolaire dual entériné par le cloisonnement entre un enseignement primaire ouvert à tous et un enseignement secondaire héritier des lycées, voie d’accès d’une petite minorité aux places d’encadrement de la société, dont le baccalauréat était le symbolique sésame. L’édifice impérial des Grandes Ecoles et des Grands Corps de l’Etat subsista. Une méritocratie de hauts fonctionnaires sélectionnés par la réussite scolaire coiffa une administration «républicaine» façonnée sous