Essayiste, historien et éditorialiste, Jacques Julliard est notamment l'auteur de l'ouvrage, les Gauches françaises. 1762-2012 : histoire, politique et imaginaire, (Flammarion, 2012).
Existe-t-il au sein du PS une gauche «progressiste» et une gauche «passéiste», comme l’affirme Manuel Valls ?
C’est de bonne guerre pour le Premier ministre de s’exprimer ainsi. Mais il vaudrait mieux parler d’une gauche «court-termiste» et «long-termiste». Les frondeurs, Martine Aubry, Benoît Hamon et les autres, voudraient des résultats tout de suite. Ils pensent que les échéances électorales ne sont plus très loin et ils ont une impatience de futurs candidats. Hollande, lui, est dans le long terme. Au fond personne ne remet en cause ses priorités : réindustrialiser et relancer l’économie. Les crispations actuelles reflètent l’éternel débat entre ceux qui veulent faire du PS un parti de gouvernement et ceux qui pensent que sa place naturelle est dans l’opposition.
Est-on toujours dans le traditionnel affrontement entre la gauche idéaliste et réformiste ?
L’ennui, c’est qu’on ne sait plus trop comment les qualifier… On dit «idéaliste» et non révolutionnaire parce qu’elle ne l’est plus. Comme la gauche n’est pas souvent au pouvoir, il faudrait avoir des résultats tout de suite ou donner des os à ronger à son électorat… Aujourd’hui, on n’est plus dans l’affrontement du type Mitterrand-Rocard ; ce n’est pas le PS qui s’est déporté à droite, c’est la situation du pays qui a changé avec le déficit des comptes publics, la dette et la croissance en berne. Du coup, les solutions de gauche qui privilégient la dépense pour relancer la consommation sont extrêmement difficiles à mettre en œuvre.
Les deux gauches qui s’affrontent au PS sont-elles encore conciliables ou la rupture est-elle à terme irrémédiable ?
C