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Libération

Le désert idéologique français

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publié le 22 octobre 2014 à 17h06

Pendant plus de deux siècles, la bataille des idées a été une grande spécialité française. Les philosophes des Lumières ont annoncé le monde moderne. Chateaubriand, Tocqueville, Auguste Comte, Ernest Renan ont illuminé le XIXe siècle. Hugo ou Zola bousculaient leurs contemporains. Guizot, Thiers, Gambetta, Ferry, Jaurès, Clemenceau marquaient leur époque et leurs voix portaient bien au-delà de l'Hexagone. Léon Blum, Tardieu, Briand provoquaient des passions. Le général de Gaulle, Pierre Mendès France mais aussi Valéry Giscard d'Estaing ou François Mitterrand suscitaient l'admiration des uns, la hargne des autres. Leurs idées ne laissaient, en tout cas, personne indifférent. Sartre, Aron, Camus, Mauriac, Malraux, c'était encore de fiers débats et de grandes causes. Mais depuis ? Où sont passés les grands intellectuels de référence, ceux que l'on appelait naïvement les «maîtres à penser» ? Bourdieu, Foucault, Althusser, sur l'autre rive Alain Peyrefitte, voire le cardinal Lustiger sont peut-être les derniers. Le débat idéologique français est comme un théâtre d'ombres. Plus d'autorités morales vers qui se tourner, plus de dirigeants politiques manieurs d'idées, lanceurs de thèmes. Etrange période, tout à fait atypique : voici le temps du désert idéologique français.

Ce n’est évidemment en rien le fait du hasard. Difficile de trouver moins idéologique que nos derniers prix Nobel de littérature (Claude Simon, Le Clézio, Modiano) ou que notre tout récent prix Nobel d’éc