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TRIBUNE

«Mme le Président» : l’Académie persiste et signe… mollement

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par Eliane Viennot, Historienne, cofondatrice de la Société internationale pour l’étude des femmes de l’Ancien Régime (Siefar)
publié le 23 octobre 2014 à 19h06

Qu’ils aient ou non appelé l’Académie française à leur secours, le député Julien Aubert (1) et les 140 signataires de la pétition soutenant ses incivilités ont dû être bien déçus à la lecture de la «mise au point» publiée le 10 octobre par les Quarante. Celle-ci commence, en effet, par une déclaration de bienveillance envers les nouveaux termes féminins, et elle se termine par une absolution générale : que chacun-e fasse à sa guise, respecte l’autre et aille en paix. Entre les deux, pourtant, l’Académie réaffirme ses dogmes - et redonne vie à des arguments aujourd’hui connus pour n’avoir aucun fondement. Cette affaire et la collection de perles qu’elle nous vaut, depuis quelques semaines, appellent quelques commentaires.

L'assemblée aime à rappeler les «missions» qui lui ont été confiées en 1634, à l'initiative de Richelieu : «Donner des règles certaines à notre langue […] la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences.» Précisons que le cardinal ministre cédait alors à la demande d'un groupe de lettrés réfléchissant depuis plusieurs décennies à la langue française. Et ajoutons qu'il y avait parmi eux une femme : Marie de Gournay, autrice (entre autres) de traités sur la langue, évidemment écartée lors de la fondation de l'Académie. On sait qu'elle attendra 347 ans avant d'accueillir la première, Marguerite Yourcenar.

On sait moins qu’à l’heure actuelle, l’Académie ne compte aucun-e linguiste, aucun-e agrégé de grammaire, aucun-e his