Professeur de sciences politiques de l’université de Montpellier-I, Jean-Yves Dormagen est avec sa consœur Céline Braconnier l’auteur de nombreuses enquêtes sur les mal-inscrits.
Les élections régionales auront vraisemblablement lieu fin 2015. Pourquoi doit-on s’inscrire si tôt sur les listes électorales - avant le 31 décembre 2014 - pour pouvoir voter ?
C’est très difficile à justifier. A l’ère de l’informatique, avec l’accroissement des mobilités de chacun, c’est même anachronique. En France, les listes électorales sont validées une fois par an, le 28 février. D’où cette inscription obligatoire avant le 31 décembre, pour répondre à une exigence administrative qui avait sans doute du sens dans une société rurale, relativement stable et immobile, mais qui paraît absurde aujourd’hui. Dans certains Etats américains, on peut s’inscrire jusqu’au jour même de l’élection. François Hollande envisage de permettre aux votants de s’inscrire au plus tard un mois avec le scrutin : c’est une mesure à mettre en avant.
En quoi cette rigidité alimente-t-elle l’abstention ?
Nous avons mené des études très précises sur ce sujet. On a pu établir qu’à la présidentielle de 2012, 15% des électeurs étaient inscrits à la mauvaise adresse. Et ces «mal-inscrits» sont beaucoup plus abstentionnistes que la moyenne. Leur chance de ne pas voter est trois fois supérieure à celle des autres inscrits. Si l’on additionne les 6 millions de «mal-inscrits» aux 3,5 millions de «non-inscrits», on a un chiffre considérable de gens qui ne votent pas dans leur lieu de résidence. C’est un vrai déni démocratique qui concerne près d’un électeur potentiel sur quatre.
Ce système profite-t-il davantage à la droite ou à la gauche ?
On se doit d’être prudent faute d’étude spécifique. Néanmoins, on sait que les mieux