Au beau milieu d'une flopée de mesures renforçant les moyens humains et budgétaires de la lutte contre le terrorisme, Manuel Valls n'a pas totalement écarté mercredi de réactiver la peine d'indignité nationale, exhumée par l'UMP la semaine dernière. Sans se prononcer personnellement, le Premier ministre a annoncé le lancement d'une «réflexion transpartisane» sur le sujet, conduite à l'Assemblée et au Sénat sous la houlette des présidents des commissions des lois respectives des deux chambres : le socialiste Jean-Jacques Urvoas et l'UMP Philippe Bas. Charge à eux de se prononcer dans les six semaines qui viennent. «Faut-il réactiver la peine d'indignité nationale qui marquerait avec une force symbolique les conséquences de la transgression absolue que constitue la commission d'un acte terroriste ?», s'est interrogé le chef du gouvernement lors d'une conférence de presse à l'Elysée intitulée «Mobilisation générale contre le terrorisme». Pour Manuel Valls, «le gouvernement n'entend pas agir dans la précipitation sur ces questions de principe» et renvoie donc la balle au Parlement. Une position d'équilibriste qui lui permet de prolonger, au moins en apparence, l'unité nationale.
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La mesure, mise en avant par la droite, avait été reprise mardi par la porte-parole du groupe socialiste à l'Assemblée nationale. «La création d'une telle peine, pour symbolique qu'elle soit, aura la vertu de rappeler que prendre les armes contre son pays est de la même nature que la collaboration avec l'occupant pendant la Deuxième Guerre mondiale», avait annoncé Annick Lepetit, députée de Paris, lors du point de presse hebdomadaire de son groupe. Le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, avait aussi expliqué qu'il n'avait «pas d'a priori» et que la mesure pouvait «se discuter». Le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, a quant à lui fait valoir ses réserves mercredi matin tout en expliquant qu'il était «ouvert» au débat.
S'il ne ferme pas la porte à l'indignité nationale, alors que François Hollande semble avoir tranché, Manuel Valls avance avec prudence sur cette mesure instaurée en 1944 par de Gaulle pour les Français coupables de collaboration avec les nazis et abrogée en 1951, plaçant toute la réponse du gouvernement dans le cadre du respect de «nos valeurs» et de l'Etat de droit. Lors de son allocution, le Premier ministre a donc souligné sa «détermination sans faille pour protéger les Français» et «lutter contre les mécanismes de radicalisation» mais aussi «pour réaffirmer nos valeurs et faire la plus belle démonstration que, face à la terreur, la démocratie, grâce à la force de l'Etat de droit, ne plie pas. Ne pliera jamais. Nous prenons des mesures exceptionnelles à la hauteur des menaces mais pas des mesures d'exception». Pour Manuel Valls, «chaque décision doit être utile, conforme à nos droits et valeurs et faire l'objet d'un consensus». Au Parlement de le trouver sur la question épineuse de l'indignité nationale.