Tout le monde attend le match gouvernement-frondeurs qui devrait se jouer ce week-end sur les bancs de l'Assemblée nationale. En jeu, les discussions sur le volet social du projet de loi pour l'activité, la croissance et l'égalité des chances économiques du ministre de l'Économie, Emmanuel Macron. Réforme des licenciements collectifs, allégement des sanctions applicables en cas d'entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel, réforme prud'homale et mise en place d'un barème des indemnités de licenciement: les sujets de désaccord s'annoncent nombreux avant le vote global, mardi après-midi. Sans oublier l'enjeu du travail dominical qui divise la majorité.
A en croire le socialiste Laurent Baumel, ils pourraient même être «un certain nombre» de frondeurs à s'opposer au texte «s'il n'y a aucun bougé pendant le week-end sur le droit du travail et le travail dominical». Mais la droite, de son côté, n'a pas dit son dernier mot. Et pourrait s'inviter sur le terrain de l'aile gauche du PS pour se faire entendre, au regard des amendements déposés.
«Rupture d’égalité»
Exemple avec l'article 98 sur le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements qui entend autoriser un employeur à mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) au niveau d'une zone d'emploi (espace géographique défini par l'Insee sur la base des flux de déplacement domicile-travail). Une manière de resserrer les licenciements sur un nombre limité d'établissements d'une entreprise. De quoi inquiéter une poignée de socialistes qui a déposé, le 23 janvier, un amendement pour supprimer ce texte qui pourrait «bouleverser l'équilibre des plans de sauvegarde de l'emploi». Mais ils ne sont pas les seuls à combattre cette «rupture d'égalité entre les salariés»: l'UMP est aussi vent debout contre la mesure. Et les frondeurs se sont même fait doubler par deux députés UMP, Patrick Hetzel et Dominique Tian, qui ont dégainé un amendement le 21 janvier, soit deux jours avant les frondeurs. Leur motivation? Supprimer cet article présenté comme «un reniement du dialogue social».
La fougue des députés UMP en faveur du droit des salariés ne s'arrête pas là. Autre illustration avec l'article 101. Selon ce dernier, la validité d'un plan social ne doit pas être étudiée au regard des moyens du groupe mais de l'entreprise concernée. De quoi laisser des marges de manœuvre aux groupes qui veulent se séparer de filiales déficitaires ou devenues non stratégiques sans trop engager leur responsabilité ou mettre la main à la poche pour financer le PSE. Une aberration pour la gauche démocrate et républicaine qui a déposé un amendement de suppression le 23 janvier, ou pour les frondeurs socialistes, qui ont demandé, le même jour, la disparition de cet article qui «réduit la protection et l'indemnisation des salariés licenciés». Mais aussi pour les députés Fillon, Balkany, Barbier, Copé, Dassault, Devedjan, Douillet, Estrosi, Lefebvre, Wauquiez, Woerth, ou encore Kosciusko-Morizet, et des dizaines d'autres députés UMP, pour qui cette mesure «se fait clairement au détriment des salariés». D'où leur zèle pour présenter un amendement contre ce texte «pas acceptable», dès le 22 janvier. Soit un jour avant tout le monde. Reste à savoir s'ils seront présents dans l'hémicycle, ce week-end, pour porter leurs valeurs «sociales» jusqu'au bout.