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Libération

Les députés ne pourront plus acheter de bien immobilier avec leur indemnité pour frais de mandat

Le bureau de l'Assemblée nationale a décidé de réformer l'IRFM, après plusieurs polémiques sur l'opacité de son utilisation par les élus.
Le bureau de l'Assemblée a décidé à l'unanimité de mettre de l'ordre dans l'utilisation faite de l'indemnité pour frais de mandat des députés. (Photo Joël Saget. AFP)
par AFP
publié le 18 février 2015 à 14h51

Les députés ont désormais interdiction d'acheter tout bien immobilier avec leur indemnité pour frais de mandat (IRFM), a décidé mercredi à l'unanimité le bureau de l'Assemblée, après plusieurs polémiques sur l'opacité de cette enveloppe et son éventuel usage à des fins personnelles.

Il n’y a donc plus d’achat possible d’une permanence parlementaire ou d’un studio à Paris, avec remboursement d’un emprunt grâce à l’IRFM. Les contrats déjà signés continuent cependant de courir en raison du principe de non-rétroactivité, a précisé une source parlementaire à l’AFP. L’IRFM (quelque 5 250 euros net mensuels par député) s’ajoute à la rémunération des députés (7 100 euros brut mensuels) et à une enveloppe pour payer leurs collaborateurs (9 504 euros par mois).

L’indemnité représentative de frais de mandat devra dorénavant être utilisée uniquement pour les frais liés à la permanence parlementaire (location et fonctionnement) et à l’hébergement, les frais de transport du député et de ses collaborateurs, de communication, de représentation et réception, ainsi que de formation, a indiqué le président de l’Assemblée, Claude Bartolone (PS).

Cette réforme, validée par la plus haute instance représentant les députés, est issue des propositions des trois questeurs de l’Assemblée (2 PS, 1 UMP), chargés de sa gestion, qui travaillaient depuis plusieurs mois sur l’usage de l’IRFM, jusqu’alors non contrôlé, et ont consulté l’ensemble des groupes politiques pour parvenir à un accord.

Pressant pour de nouvelles règles, l'association Pour une démocratie directe avait fin janvier dénoncé le fait que nombre de députés aient utilisé cette indemnité pour acquérir leur local de permanence, enrichissant ainsi leur patrimoine. Plusieurs élus de tous bords avaient plaidé le «bon calcul économique», l'achat étant plus intéressant que la location, selon François Sauvadet (UDI).

Voyages en famille 

Le président de Pour une démocratie directe, Hervé Lebreton, plaidait lui pour un remboursement des frais de mandat sur justificatifs, une voie jugée largement à l’Assemblée comme trop lourde. En vertu des nouvelles règles décidées mercredi, chaque député sera tenu, une fois par an, avant le 31 janvier, d’adresser au Bureau une déclaration attestant sur l’honneur qu’il a utilisé l’IRFM au cours de l’année précédente conformément à ce qui est autorisé.

En outre, le président de l'Assemblée pourra, après avis du Bureau, saisir le déontologue de l'institution «d'une demande d'éclaircissements concernant la situation d'un député, avec pour mission de lui en faire rapport».

Le déontologue, Ferdinand Mélin-Soucramanien, conseille déjà fréquemment les élus, à leur demande, quant à leur IRFM. Celle-ci est l’objet de révélations régulières par la presse comme en 2012 lorsque Pascal Terrasse (PS) s’était fait épingler pour avoir réglé par ce moyen des voyages pour sa famille.

Le bureau a rappelé aussi mercredi aux députés qu'ils ont «l'obligation d'avoir un compte dédié à l'IRFM à partir duquel il ne peut être fait de virement vers un autre compte personnel» ainsi que «l'obligation de reverser, à la fin du mandat ou en cas de cessation de mandat, la part non consommée de l'IRFM».

Cette indemnité ne peut en outre être utilisée pour une campagne électorale ou pour payer sa cotisation au parti. «Il n'y a pas de profession plus contrôlée que celle de député», estime le premier questeur, Bernard Roman (PS), rappelant la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, créée début 2014, a pour mission de suivre l'évolution du patrimoine des parlementaires, qui est déclaré en début et fin de mandat.

Les débats ont été néanmoins nourris au bureau de l'Assemblée. Les écologistes ont plaidé pour aller plus loin, via des contrôles aléatoires des dépenses. «Nous sommes isolés sur cette proposition, une résistance demeure», juge le coprésident du groupe EELV, François de Rugy, qui salue néanmoins l'étape franchie et s'attend à une remise à plat en 2017 avec le non-cumul des mandats.

Prochain épisode sans doute au Sénat en mars, où le président Gérard Larcher (UMP) doit annoncer une réforme du fonctionnement de son assemblée, qui pourrait comprendre l’IRFM des sénateurs, de 6 037 euros net mensuels.