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Motion de censure : le groupe Front de gauche divisé

Valls évite la censuredossier
Si certains députés communistes sont prêts à voter le texte UMP-UDI déposé dans la foulée du 49.3, Mélenchon a fait savoir que, s'il siégeait à l'Assemblée, lui ne s'associerait pas à la droite.
Le président du groupe Front de gauche à l'Assemblée, André Chassaigne , en juin 2014 (Photo Dominique Faget. AFP)
publié le 18 février 2015 à 13h39
(mis à jour le 18 février 2015 à 16h36)

La motion de censure, qui sera débattue jeudi soir par l'Assemblée, n'a aucune chance d'être adoptée mais elle parvient à réunir un curieux attelage. Les députés UMP et UDI la voteront logiquement, dans la foulée du recours à l'article 49.3 par le gouvernement pour faire passer sa loi Macron. Mais ils devraient aussi être rejoints par certains députés du Front de gauche. Pas tous: au moins cinq d'entre eux estiment que c'est un comble de s'associer à la droite sur un texte qui prône des réformes «de l'Etat, de nos régimes de retraites, de la protection sociale». Réticence reprise ce matin par Jean-Luc Mélenchon. S'il siégeait à l'Assemblée, le député européen «n'aurai(t) pas procédé comme ça». «Qu'est-ce qu'on va se fourrer avec la droite dans une aventure pareille?, s'est-il agacé sur France Info. J'aurais proposé aux frondeurs et aux écologistes une motion de censure pour montrer que si le gouvernement est désapprouvé, il l'est par la gauche.»

«On ne vote pas de gaieté de cœur»

Un scénario rêvé pour le Front de gauche mais injouable puisqu'il faut réunir 1/10e des membres de l'Assemblée pour pouvoir déposer une motion de censure, soit 58 députés. Le groupe GDR du Front de gauche en compte 15 (avec les cinq députés ultramarins qui ont leur propre positionnement), le groupe EE-LV 18, et les frondeurs sont une quarantaine au maximum. Seulement écologistes et frondeurs ne sont pas prêts à déclarer la guerre au gouvernement Valls. Le chef de file des députés Front de gauche, André Chassaigne, a contacté son homologue des Verts, François de Rugy, qui a exclu une telle initiative. Et même les plus remontés des socialistes anti-loi Macron ne se voient pas une seconde entreprendre de faire tomber le gouvernement Valls. «J'aurais évidemment préféré déposer une motion de gauche alternative. Je partage une partie de l'analyse de Jean-Luc mais puisque c'est impossible, nous n'avons pas d'autre choix que de voter la motion de l'UMP. Ce n'est pas de gaieté de cœur. Nous ne partageons absolument pas ce texte mais nous le votons pour des raisons différentes», explique André Chassaigne. Le communiste a tout de même lancé une «motion de censure de gauche» avec Jacqueline  Fraysse et Marie-George Buffet (PCF) et les deux EELV Isabelle Attard et Sergio Coronado. Sans croire sérieusement en ses chances: n'ayant pas atteint le seuil de 58 signataires, ce mercredi à 16h30, l'initiative est tombée à l'eau.

Alors que le ministre des Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, s'est dit sur RTL «choqué» de cette décision «historique», Chassaigne rappelle les précédents pour minimiser. Le PCF a déjà ajouté ses voix à celle de la droite sur deux motions de censure: en 1992 contre le gouvernement Rocard sur la création de la CSG et sur la réforme de la PAC.

Les députés Front de gauche se sont réunis mercredi une fois le 49.3 dégainé par Manuel Valls, pour arrêter leur position. Les avis étaient partagés. Gaby Charroux, Nicolas Sansu, Patrice Carvalho, Alain Bocquet et Jacqueline Fraysse sont très réservés. «Je ne reviens pas sur le coup de force de l'exécutif, ni sur la loi Macron qui est inacceptable. Mais le texte de l'UMP me déplaît radicalement, je n'ai pas envie de m'y associer», justifie Gaby Charroux. «Je n'ai jamais prôné la politique du pire pour arriver au meilleur. On n'est pas là pour se faire plaisir: je ne vote pas avec la droite, cela ne veut pas dire que je vote la confiance au gouvernement», prévient Nicolas Sansu. Sans désespérer de convaincre un jour écolos et frondeurs du PS de faire cause commune: «J'attends avec gourmandise le prochain budget, par exemple…»