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Libération
EDITORIAL

Rhétorique

publié le 18 février 2015 à 20h06

«Mains propres, tête haute.» Ce fut l'un des slogans du Front national. Tête haute, admettons. Pour le reste, on doute… A côté de sa dénonciation obsessionnelle de l'immigration, le Front national a fondé sa rhétorique sur une distinction qu'il a inventée et qui a ensuite fait florès : il y a «le système» et les autres. Le système, ce sont les partis de gouvernement, drogués à la pensée unique, méprisants pour le peuple, abonnés au pouvoir, qui forment un petit monde de connivence, de conformisme, de cynisme… et de corruption. Les autres, c'est le FN. Bien sûr, les affaires politico-financières qui émaillent la vie publique apportent de l'eau sale à ce moulin idéologique. Sauf que le Front national lui-même n'a rien à envier àses concurrents en matière d'affaires judiciaires. Et même si son microparti s'appelle «Jeanne», sa virginité financière n'est en rien garantie. La justice dira si les pratiques de financement du Front sont blanc-bleu. On se gardera donc d'anticiper. Mais on jettera un regard rétrospectif sur les rapports du FN et de l'argent. On constatera alors que la distinction par lui établie entre ceux qui touchent et ceux qui ne touchent pas relève, non des faits, mais d'une simple rhétorique propagandiste.