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Désintox

Travail du dimanche : Thierry Mandon survend la loi Macron

Le secrétaire d'Etat à la Réforme de l'Etat et à la Simplification affirme que la loi Macron va instaurer une compensation salariale plancher pour les salariés du commerce.
Thierry Mandon à Paris en novembre 2011. (Photo Fred Dufour. AFP)
publié le 18 février 2015 à 17h57

INTOX. Dans l'émoi qui a accompagné l'utilisation de l'article 49-3 de la Constitution pour forcer le passage de la loi Macron, certains sont tentés d'en faire un peu trop pour justifier la décision du gouvernement. Thierry Mandon, secrétaire d'Etat chargé de la Réforme et de la Simplification, a ainsi profité de son passage à la matinale de France Inter, mercredi, pour vanter le texte plus que nécessaire :

«Dans le commerce aujourd'hui, les salariés qui travaillent le dimanche n'ont pas le droit à être rémunérés plus que s'ils ne travaillaient pas le dimanche… Y'a un progrès ! Maintenant c'est 30%. Désormais, tous les salariés du pays qui travaillent le dimanche, tous, dans le commerce, auront au minimum 30% de compensation salariale supplémentaire.»

C’est à revivre autour de 5’05" :

DÉSINTOX. Bonus pour tout le monde ? A écouter Thierry Mandon, on a tôt fait de croire que les articles de la loi «pour la croissance et l'activité» qui libéralisent un peu plus le travail dominical cachent en fait une excellente nouvelle pécuniaire pour les salariés du commerce concernés. Mais c'est un peu gros…

Certes, depuis l’adoption de la loi Mallié en août 2009, la réglementation du travail dominical est plutôt confuse, produit d’une mosaïque d’accords et de dérogations. Les compensations allouées aux travailleurs du dimanche sont aujourd’hui très loin d’être harmonisées : elles varient selon le type de commerce et la zone géographique, que ce soit en termes de majoration de salaires, de temps de repos ou de garde des enfants.

Il n'empêche, Thierry Mandon ne peut pas ne pas savoir que les travailleurs du dimanche bénéficient déjà d'une majoration de salaires dans bien des cas. C'est le cas par exemple de ceux qui travaillent dans les Puce (Périmètres d'usage de consommation exceptionnel), un zonage issu de la loi Mallié - et aboli par la loi Macron - où le salaire est doublé. Les maires peuvent aussi autoriser l'ouverture des commerces de leurs communes jusqu'à cinq dimanches par an (dérogation dite des «dimanches du maire»), avec, là encore, doublement de salaires.

Thierry Mandon feint surtout d’oublier que demain, la loi Macron n’imposera pas de majoration salariale «plancher». La majoration de 30% ne vaudra que pour les commerces alimentaires de plus de 400 m², autrement dit les grandes surfaces. Les salaires resteront doublés les «dimanches du maire», et le deviendront en horaires de nuit dans les nouvelles «zones touristiques internationales» créées par la loi. Pour tous les autres commerces concernés (zone commerciale, zone touristique, zone touristique internationale hors horaires de nuit, ou une des douze grandes gares sélectionnées), la loi conditionne désormais l’ouverture dominicale à un accord de branche ou d’entreprise, négocié au cas par cas par les salariés et leurs employeurs. L’amendement proposé par la députée communiste Jacqueline Fraysse, qui prévoyait un doublement des salaires pour ces zones, n’a pas été retenu. Ce sont donc ces accords, et non la loi, qui fixeront le montant des compensations.