Menu
Libération

Une motion de censure qui remet de l’ordre au PS

Valls évite la censuredossier
Le texte déposé par l’UMP et l’UDI, qui sera voté jeudi, n’a aucune chance d’être adopté. Tous les députés PS devraient voter contre, alors qu’une partie des élus Front de gauche pourrait le soutenir.
Le Premier ministre Manuel Valls le 17 février 2015 à l'Assemblée nationale à Paris (Photo Patrick Kovarik. AFP)
publié le 18 février 2015 à 20h06

Avec la même gourmandise qu'ils observent, depuis deux jours, leurs camarades socialistes s'étriper, les députés UMP se feront un plaisir de voter, ce jeudi à 18 heures, la motion de censure déposée en tandem par la droite et l'UDI. Alors que Manuel Valls pourra plastronner sur l'absence «de majorité de rechange» - la motion n'ayant aucune chance d'être adoptée -, eux condamneront comme un seul homme ce gouvernement qui a «déserté le champ de la politique économique et sociale de la France», comme l'écrivent l'UMP Christian Jacob et le centriste Philippe Vigier. Sans doute bien plus à l'aise que s'ils avaient dû se prononcer pour de bon sur la loi Macron.

«Brevet». «Si le texte avait été adopté à quatre voix, cela nous aurait quand même mis sacrément dans la merde ! Cela aurait été cautionner que le gouvernement était réformateur», rembobine un parlementaire UMP, alors que quatre de ses collègues s'apprêtaient à approuver le projet de loi. «Et vous imaginez si c'était passé à une voix ?» plaisante Thierry Mariton. Lui comptait voter pour, ce qui ne l'empêchera pas d'approuver la motion de censure. «A droite, on n'a pas été très cohérents sur cette loi qui comporte quelques idées de bon sens. Ce n'est pas pour autant que je délivre à Macron un brevet de libéral», justifie-t-il.

«Avec la motion de censure, c'est redevenu propre : chacun chez soi, la balle au centre», se félicite un député de l'opposition. Plus question de rejeter des mesures que la droite n'aurait pour la plupart pas reniées si elle avait été au pouvoir. Pour amadouer l'UDI, dont une majorité prévoyait de s'abstenir et huit projetaient de voter pour, l'UMP ne se focalise pas sur la loi Macron. Et attaque en bloc «l'action du gouvernement depuis 2012 : aucune réforme de structure, des revirements incessants, des choix qui annihilent toute chance de reprise». Mercredi soir, en réunion de groupe «post-49.3», «on a demandé que la motion ne soit pas un brûlot anti-Macron mais porte globalement sur la politique économique», raconte Thierry Solère. «Il y a une partie de la philosophie de Macron que l'on partage, admet Philippe Gosselin (UMP). Mais le 49.3 nous donne l'occasion de mettre en avant l'échec du gouvernement sur la croissance.» Une formule qui permet de rallier les centristes. Avec plus ou moins d'enthousiasme : l'UDI Jean-Christophe Fromantin, favorable à la loi Macron, demande à l'opposition qu'«au-delà de cette posture d'indignation», elle fasse «des propositions audacieuses».

«Pire». La droite devrait compter sur un renfort inattendu. Des députés du PCF et du PG comptent approuver la motion qui prône pourtant des réformes «de l'Etat, de nos régimes de retraites, de la protection sociale». Si le président de groupe, André Chassaigne, a tenté de déposer, avec Isabelle Attard (Nouvelle Donne) et Sergio Coronado (EE-LV), une «motion de censure de gauche», l'initiative était vouée à l'échec puisqu'il fallait un dixième des membres de l'Assemblée. «Comme nous n'avions pas 58 députés, nous n'avons pas d'autre choix que de voter la motion de l'UMP mais nous ne partageons absolument pas leur texte. Ce n'est pas de gaieté de cœur», se résigne Chassaigne. Son groupe est divisé, cinq communistes étant réticents à voter avec la droite. «Je ne prône pas la politique du pire pour arriver au meilleur. On n'est pas là pour se faire plaisir», prévient Nicolas Sansu, député communiste du Cher. Jean-Luc Mélenchon lui-même ne sait manifestement pas quoi en penser. Sur son blog, il jugeait mardi soir que «la seule façon de bloquer la loi et de faire cesser le chantage comme méthode de gouvernement, c'est de voter la censure». Le lendemain sur France Info, le leader du Parti de gauche se demandait toutefois pourquoi les députés Front de gauche allaient «se fourrer avec la droite dans une aventure pareille».