Conquérir le monde rural, et notamment les professions agricoles : cet objectif du Front national a servi de fil rouge à la visite de Marine Le Pen au Salon de l’agriculture, jeudi à Paris. Entourée de quelques cadres du parti et de nombreux journalistes, la présidente du FN a entamé sa déambulation peu avant 10 heures du matin. Elle devait rester jusqu’à la fin d’après-midi dans les allées du salon. Sur son passage, les manifestations de curiosité ou de sympathies – et notamment les demandes de photos – l’ont emporté sur les remarques hostiles.
A l’approche des élections départementales, le parti d’extrême droite a redoublé d’efforts pour tenter de séduire les agriculteurs – soit environ un million de personnes en France, selon le recensement agricole de 2010. La profession reste largement ancrée à droite, 44% de ses représentants ayant voté pour Nicolas Sarkozy au premier tour de la présidentielle de 2012 ; mais ils avaient également été 19,5% à choisir Marine Le Pen, contre 18% pour l’ensemble des électeurs. Le FN espère progresser dans cet électorat pour mieux s’implanter dans les zones rurales, où il arrive en tête des intentions des votes pour les prochaines départementales.
«Miroir aux alouettes»
Pour cela, le mouvement lepéniste a développé un argumentaire spécifiquement dédié au monde agricole, fondé sur le protectionnisme et la disparition de la politique agricole commune (PAC). «Les agriculteurs français reçoivent bien 9,1 milliards d'euros par au titre de la PAC, explique Philippe Loiseau, député européen FN. Mais c'est oublier que la contribution française au budget européen atteint 21 milliards.» Le parti propose notamment de mettre fin à ces versements, et de consacrer 12,9 milliards à une «politique agricole française». Le FN se prépare également à lancer un collectif professionnel intitulé «France Ruralité». Deux de ses eurodéputés, Philippe Loiseau et Edouard Ferrand, ont d'ores et déjà entamé une série de déplacements sur le terrain pour faire valoir le programme frontiste.
Lors de leurs propres visites au salon, François Hollande, Manuel Valls, mais également Alain Juppé ont mis en garde les agriculteurs contre le «miroir aux alouettes» du vote FN. «Malgré toutes les imperfections de la Politique agricole commune, c'est quand même cette PAC qui a permis depuis cinquante ans à notre agriculture de se développer, a jugé ce dernier. Il faut regarder très précisément ce que c'est que le programme du Front national : un programme tout à fait démagogique qui conduira les finances françaises à la catastrophe.» Le président du syndicat agricole FNSEA a de son côté estimé que Marine Le Pen «vend beaucoup de peur» et «beaucoup de rumeurs» au monde paysan.