«L'islam, peste bubonique», les homosexuels «pédophiles», «qu'on mette les Arabes sur un bateau et qu'on les fasse couler»… Le Front national voulait des candidats «propres», qui savent se contenir. Raté. Il voulait faire des prochaines élections départementales une démonstration de force. Et y est parvenu, en se présentant dans 93% des cantons, mais au prix de certains recrutements douteux. Dans le lot, Marine Le Pen le reconnaît, beaucoup ne sont pas «des professionnels de la politique». Et ça se voit.
Sur les pages Facebook, les comptes Twitter ou les blogs de certains candidats, les allusions racistes se succèdent. Florian Philippot, vice-président du Front national, plaidait jeudi matin qu'il n'y avait que quelques cas recensés, anecdotiques. En réalité, les dérives sont nombreuses. Voici, en vrac et fautes d'orthographe comprises, celles que Libération, et d'autres journaux, ont repérées, après une recherche loin d'être exhaustive – Le FN présente 7 648 candidats, suppléants compris. Ce sont les sorties plus franches, là où l'islamophobie, l'homophobie et les délires complotistes sont les plus flagrants.
Dominique Klein, candidat dans le canton Domrans-Paysages de Champagne, dans la Marne, prônait, après l'attentat contre Charlie Hebdo, la lutte armée contre les «fous d'Allah» qu'il mettait allègrement dans le même sac que les musulmans : «Donnez nous les moyens: une marche en bon ordre, bien armée, pour bien répondre à ces débiles, pour les bouter hors de nos frontières ! Charles Martel doit se retourner dans sa tombe !!! Bien, l'islam à la française, bien le financement des mosquées… Tout ça dehors !!!!» En février, il a partagé sur Facebook un dessin islamophobe posté par l'inénarrable Serge Ayoub.
Une vieille dame obligée de faire les poubelles pour manger, c'est forcément la faute aux immigrés. C'est en tout cas ce que pense Maryse Lacombe, candidate FN dans le 86, canton Jaunay-Clan. Le 10 juin, cette retraitée de la fonction publique, déjà candidate FN pour les cantonales 2012 partage cette photo, légendée ainsi : «Pendant que nos retraités font les poubelles, les immigrés eux, touchent une retraite à taux plein sans jamais avoir cotisé.»
Des Arabes qui mendient en France, ça vous choque ? Si oui, votez Front national. Cette publicité pour le FN est signée Aymeric Perraud, candidat frontiste sur le canton de Montigny-Les-Metz où il est conseiller municipal. Responsable départemental du FNJ en Mozelle et soutien indéfectible de Nathalie Pigeot, accusée par d'anciens militants du département d'avoir possédé des objets à la gloire du IIIe Reich, il fait beaucoup la promotion du parti d'extrême droite sur Twitter.
Interrogé par Libération après la publication de son tweet, le 3 mars, Aymeric Perraud botte en touche : «Ça ne rentre pas dans les compétences du conseil departement et n'a aucun intérêt pour la campagne.» On n'en saura pas plus. Pas plus que pour ce tweet, rédigé le même jour :
Candidat à Epernay (Marne), Cédric Demange, amateur de blagues sur le régime halal, a posté plusieurs messages et images xénophobes sur son profil Facebook. Il a notamment commenté un fait divers (un homme s'était fait tabasser à la sortie d'une discothèque) en affirmant : «Merci la justice, et encore des "suédois" qui s'en tirent tranquille.»
Alex Pellouard, candidat à Chaumont (Haute-Marne) parle régulièrement sur son profil Facebook (désormais fermé) des «bicots», des «bougnoules», et s'enflamme : «A mort les ratons !»
Le 25 mai 2014, apparemment ravi du résultat des élections, il poste : «25,4% pour le FN ! Mais ils sont ou…? Mais ils sont ou…? Mais ils sont ou tous les bougnouls la la la la la…»
Gérard Lajoie, 61 ans, membre convaincu du FN depuis 1998, est candidat dans le canton de Montrichard (Loir-et-Cher). Pour lui les les Corses ont bien raison : l'île de beauté n'est pas la France. Indépendantiste ? Non. Seulement, pour le retraité de la Banque de France, le pays des droits de l'homme est aujourd'hui le pays des mosquées, des femmes voilées, des prières de rues, des tournantes et des hommes qui se font égorger pour avoir refusé du feu. Contrairement à la Corse où la charcuterie est toujours en vente libre…
Candidat à Pierre-de-Bresse, en Saône-et-Loire, Sébastien Alloin s'est plusieurs fois illustré dans la vie locale.
Ce secrétaire départemental du FN a eu mauvaise presse l'année dernière, lorsqu'un couple s'est retrouvé sur sa liste pour les municipales, apparemment sans y avoir consenti. Ils ont d'ailleurs a écrit au préfet de Saône-et-Loire pour dénoncer un «abus de faiblesse et de confiance», comme l'a rapporté à l'époque l'Express. En avril, un habitant de sa ville, Louhans, publiait sur son blog une photo du candidat déguisé en nazi à plumes, moustache et salut hitlérien compris.
Damien Hameau-Brielles, qui se présente en Mayenne (dans le canton de Bonchamp-lès-Laval) a déjà été repéré par le site l'Entente, pour s'être faussement demandé sur Facebook comment «trois noirs [pouvaient] être debout à 7h30 du matin». Depuis, il a restreint l'accès à son profil, mais on peut tout de même voir les pages qu'il a likées : «Je mange du porc et je t'emmerde», ou encore «Stop au bordel après les matchs de l'Algérie».
Candidat dans le canton Mont-de-Marsan-2, Michaël Aulnette, fonctionnaire et partisan de la Manif pour tous, a un profil Facebook plutôt lisse, à l'exception d'un post datant de juin 2013 : «Qui pourrait me prêter pour le jeudi 20 juin, Kamis, sarouel, djellaba et une burqa pour ma femme. J'ai un contrôle de la CAF à la maison. Ainsi que trois ou quatre gamins, je n'en ai que trois à la maison», le tout suivi d'une signature en arabe.
Patrice Henri Quéffélec est membre du Front national de Vendée, il est candidat dans le canton d'Aizenay. Avec une petite tendance islamophobe. Sous la photo ci-dessous, postée sur son profil Facebook, le premier commentaire dit «à distribuer à tous les islamistes».
Jacques Borde est dans candidat en Haute-Vienne, dans le canton Limoges 1. Son profil Facebook, encore ouvert il y a quelques jours, n'est désormais plus disponible. Dommage, il contenait une mine d'informations à destination des plus incultes. Comme ce post, daté du 27 septembre 2014, dans lequel Jacques Borde expose ses connaissances en islam. Il écrit : «Mensonge aussi bien de la part du recteur que des fidèles ainsi que des journalopes [mash-up entre "journalistes" et "salopes", ndlr]. Pourquoi ces messieurs ne disent-ils pas ce qui est réellement écrit dans leur coran satanique, où il est recommandé de tuer les mécréans ? Ils veulent nous faire croire que c'est une religion de paix, d'amour et de tolérance, mais dans leurs actes nous démontrent le contraire. Il n'existe pas 36 islams mais bien un seul, celui qui prône l'assassinat et la guerre sainte !»
Tête de liste FN aux dernières municipales 2014, Vincent Gérard est entré au conseil municipal de Limoges en compagnie de ses deux premiers colistiers. Quelques mois plus tôt, cet artisan de 52 ans avait reçu le soutien de Jean-Marie Le Pen, venu à Limoges participer à une réunion publique. Candidat aux cantonales en 2011 dans le canton de Saint-Laurent-sur-Gorre, Vincent Gérard avait totalisé 7,06% des suffrages au premier tour. En 2012, il n'avait pu se présenter aux législatives à cause d'un problème de santé. Cette année, aux départementales, il a été investi par le FN à la bastide, canton Limoges 4. Il s'en est fallu de peu pour ce père de trois enfants condamné en septembre 2013 à quatre mois de prison avec sursis pour une bagarre, décision pour laquelle il a fait appel.
Vincent Gérard est très actif sur Facebook. En bon candidat, il se sert des réseaux sociaux pour annoncer ses déplacements et ses opérations de tractage. Mais pas que. Le 3 novembre 2014, il raconte avoir fait son marché dans le quartier Carnot, dans le centre-ville du chef-lieu de la Haute-Vienne. «Pas la peine de prendre l'avion pour se sentir dépaysé !!!», écrit-il sans préciser son propos.
Quinze jours plus tôt, le conseiller municipal poste la photographie d'une femme promenant un jeune enfant en poussette. Elle est habillée en burqa. «Agissez avant qu'il ne soit trop tard…» écrit Vincent Gérard.
Le cliché aurait été pris le 7 mai 2014 devant la gare de Limoges, comme en témoigne un autre post de Vincent Gérard, plus tôt dans l'année. La liberté des femmes est-elle une obsession du candidat, ou s'agit-il de l'islam ?En août, il poste un montage photo. Titré «Liberté ou islam ?», il montre les jambes d'une femme en jupe, avec une graduation, des chaussures au haut de la cuisse. En bas : conforme à la charia, en haut : lapidation.
Alexandre Simonnot, le secrétaire départemental du FN dans le Val-d'Oise, qui se présente dans le canton de Taverny, aime une France chrétienne et royaliste. Sur son compte Twitter, il rend par exemple hommage à «notre reine Marie-Antoinette sauvagement assassinée». Mais ce qui le gêne surtout, c'est la «surmédiatisation du ramadan, loin d'être le fruit du hasard [qui] s'inscrit dans un processus toujours plus croissant d'islamisation-déchristianisation de notre société», comme il l'écrivait en 2011 dans un communiqué de presse.
Le candidat Michel Seuret, dans le canton de Bletterans, dans le Jura, postait en novembre dernier sur son compte Facebook, un raisonnement effarant. Il estime qu'en «enlevant le RSA ou les allocations familiales, on entendra plus parler d'islam en France».
Christine Galvaire est candidate FN en Charente. A 48 ans, cette assistance administrative à domicile utilise Facebook comme une page personnelle. Elle y poste ses envies et ses humeurs, beaucoup de photos de sa fille, ou de vacances. Quelques annonces aussi. Comme ce 3 août 2013 : «ATTENTION CET HOMME RODE DANS CHATEAUNEUF !!!» L'homme en question, Christine Galvaire n'a «pas pu le prendre [en photo, ndlr] de face». Mais une chose est certaine : «Il est de type musulman», assure-t-elle, photo à l'appui.
Le 30 août 2012, elle partage cette «blague», un cliché montrant trois femmes en burqa, qui dialoguent : «On va… — Au bal-mosquée… — Ohé ohé !!!» La compagnie créole appréciera.
Le jeune candidat FN à Alès, Jérémie Boulet, semble adepte de la théorie «du grand remplacement» de l'écrivain français d'extrême droite Renaud Camus. En décembre dernier il a tweeté une photo de François Hollande entouré d'enfants issus de la diversité avec la légende «L'image parle d'elle-même ! #GrandRemplacement.»
L'image parle d'elle-même ! #GrandRemplacement pic.twitter.com/sNuuQ6ybz3
— Jérémie B (@jeje_bt) December 14, 2014
Claude Bousalem, candidat de Grenoble, affirme qu'il n'est pas «raciste mais qu'il aime son pays». Il a posté de nombreux commentaires assimilant musulmans et jihadistes, sur Twitter.
Candidat dans le Gard, Nicolas Meizonnet, élu Bleu marine et candidat à Vauvert, écrit sur Twitter «Pour une majorité d'harkis et de pieds-noirs, l'acte 2 de la guerre d'Algérie n'est pas un fantasme.» Dans une suite de hashtags il évoque ensuite les noms de terroristes islamistes «Kelkal, Merah, Nemmouche, Dekhar, Kouachi».
Bernard Baisson, candidat dans le canton de Tarn et Causses, avait déjà présenté sa candidature à la mairie des Angles, près d'Avignon, en 2014. A l'époque, pour faire campagne, il faisait des remarques comme celle-ci, citée par Europe 1 qui l'avait suivi une journée : «Le Rom, lui, ne travaille pas. Il ne veut pas travailler et de toute façon, il ne veut que voler, depuis toujours.» Il s'inquiétait aussi d'une trop forte présence de non-Blancs à la télévision : «On ne peut pas faire un reportage sans voir trois gens de couleurs, deux Asiatiques et quatre Maghrébins de deuxième et troisième générations. On vous les impose comme si c'était une normalité.»
Julien Langard est conseiller municipal FN de Carpentras et candidat dans le Vaucluse. Après les attentats à Paris, il déclare sur son profil Facebook : «Les Français sont, Dieu merci, de moins en moins dupes des dérives de l'islamisme sur notre sol. Même les contes des Mille et Une Nuits ont une fin !!!» Le 7 septembre, il stigmatisait un mariage de musulmans, avec deux photos d'un journal : «Voici un extrait du carnet blanc des mariages de ce WE à Carpentras. Si vous pensez que Fouzia et Rachid, sans professions, sont une chance pour un pays qui a dépassé les 5 millions de chômeurs, inscrivez-vous sur www.UMPS.com»
Claude Ratel, candidat dans le canton de Ceor-Ségala (Aveyron), a partagé, le 6 février, avec un certain plaisir le «courageux» message d'une électrice appellant «les musulmans» à «retourne[r] dans [leurs] pays, si nos traditions et nos coutumes vous déplaisent tant que ça !» Et d'ajouter : «Vous nous faites chier à vouloir tout changer alors que vous n'étiez pas capables de le faire chez vous !» Conclusion de l'internaute, partagée par Claude Ratel : «Qui sont les vrais racistes d'après-vous ? VOUS, les musulmans. […] Intégrez-vous ou dégagez !»
Alexis Richert, candidat à la Charité-sur-Loire (Nièvre), associe femme en burqa et apiculteur sur Facebook. L'ex-villiériste s'implique généreusement dans la recherche de Fatima, disparue le 28 janvier à Montreuil. Malheureusement, blague douteuse, Alexis Richert n'est pas aidé dans son entreprise puisqu'il est impossible de distinguer une quelconque partie de l'évaporée.
Christophe Gaillard, conseiller municipal FN de Nevers et candidat dans le canton de Nevers-2 (Nièvre), n'a pas vraiment apprécié l'affiche d'un film présenté en conseil municipal, en novembre dernier. La relève, c'est nous a été réalisé par des jeunes du quartier du Banlay et vise à en donner une image positive. «Si on n'avait mis que des Blancs sur cette affiche, on aurait dû faire machine arrière», a soufflé le candidat. Au maire qui lui demandait de préciser ses propos, l'élu frontiste a répondu : «L'affiche montre des personnes de couleur noire en disant : la relève, c'est nous. C'est une provocation.» Ses propos ont provoqué un tollé au sein du conseil municipal.
Candidate dans le canton de Givry en Saône-et-Loire, Céline Ripoteau a une dent contre les étrangers en général et les musulmans en particulier. Dans un post publié sur Facebook en 2011, cette cheffe de rayon d'hypermarché explique notamment : «Je donne mon sang et je mange du porc mais…..???????????? Mais, ALORS ? Mon sang aurait-il servi à sauver un musulman ? Si cela s'est produit, je l'ai contaminé….» avant de détailler les produits cosmétiques dans lesquels on trouve, croit-elle savoir, de la graisse de porc. En mars, elle a publié un poème clairement xénophobe terminant par «Il reviendra Charles Martel».
Claire Richert, professeure de lettres retraitée et candidate dans le canton de Varennes-Vauzelles (Nièvre), qualifie les musulmans de «danger».
Dans le canton de Guérigny (Nièvre), avec Delphine Got (sans profession) et Guillaume Vergnaux (mécanien agricole), le FN présente un binôme obsédé par le halal et les cochons «patriotes».
Jean-Christophe Gruau, candidat dans le canton de Laval-3 (Mayenne), est un habitué des dérapages racistes, homophobes, islamophobes, xénophobes… En février 2014, l'Obs avait déjà listé des propos tenus notamment sur son blog, alors qu'il se présentait aux municipales. Des «socialos [qui] marient des sodomites», au «cancer» que serait l'immigration, de l'«africanisation» de sa ville aux étrangers qui feraient des gosses pour les allocs, tout y passe.
Africanisation de Laval ; de belles âmes me vouent aux gémonies à cause de mes bons yeux mais les chiffres de l'INSEE me donnent raison #OF
— JC GRUAU (@JCGRUAU) March 7, 2015
Elie Quisefit, candidat à Narbonne (Aude), avait écrit sur sa page Facebook en 2012 : «Il y a des battues contre les sangliers… contre les loups… contre les lynx… contre les ours… Etc. Et si on organisait plutôt des battues contre les arabes, on sauverait peut-être la France.» Des propos rappelés par l'Indépendant. Il a tenu à nuancer ses propos auprès du journal : «C'est un dérapage, mais ce n'était pas du racisme, plutôt une exaspération.»
Jean-Marc Buccafurri, candidat à Epinay-sur-Seine (seine-Saint-Denis), n'aime pas les arabes et les homosexuels. Rue89 a creusé l'affaire : sous le pseudo @titifoso, il attaquait en août 2014 Najat Vallaud-Belkacem, alors nouvelle ministre de l'Education nationale : «La pute à PD LGBT soumise @najatvb à l'Education nationale, une provocation de plus faite aux familles par ce gouvernement pourri ! #Dissolution». Quant à l'homosexualité, ce «n'est pas une norme, c'est une déviance !! #NoPasaran».
Marie-José Dussaucy, candidate dans le canton d'Ustaritz (Pyrénées-Atlantiques), s'est vu retirer son investiture après avoir publié sur sa page Facebook : «Vos grands-parents se sont battus afin que vous ne soyez pas allemand… battez vous pour ne pas devenir arabe.» «Qu'on les mettent (sic) sur un bateau et qu'on le fassent (sic) couler au milieu de la mer ou de l'océan.» Ou encore : «Nous préférons la liberté avec le FN à l'esclavage avec l'islam.»
Gérard Brazon, candidat Front national des Hauts-de-Seine, suggère pour la France une ablation de l'islam. Dans un tweet posté en octobre 2013, il précise : «Opération Pédalo et Islamectomie : Comment débarrasser la France de Hollande et de l'islam.» [Mise à jour du 16 mars 2015 : Gérard Brazon explique à Libération que ce tweet ne fait que reprendre les titres de deux ouvrages publiés par le site islamophobe Riposte Laïque]. Cet ancien de l'UMP (et même du RPR) se dit ouvertement islamophobe dans un autre tweet publié en août 2013. Et il ne comprend pas qu'on s'offusque d'une profanation de mosquée.
Gérard Brazon appelle aussi à la révolte des moutons… et au meurtre. Après un accident lors de la fête de l'Aïd qui a provoqué la mort d'un musulman, il a invité «tous les autres moutons de France, ceux qui attendent que les choses changent avant de bouger eux-mêmes […] qu'ils fassent comme le mouton d'Hamadcha, qu'ils se rebellent et se bougent.»
En février dernier, il poste une vidéo «comique» montrant plusieurs arabes lutter contre un escalator. Commentaire de notre candidat : «Les dangers du partage d'une technologie. Nous n'avons pas idée, nous les occidentaux, des risques que nous faisons prendre à ces braves gens… Un escalier roulant c'est pas évident…»
Denis Sourd est candidat dans la huitième circonscription de la Haute-Garonne (Canton de Bagnères-de-Luchon). Cet artisan de Saint-Gaudens a partagé un dessin illustrant la théorie d'extrême droite sur le grand remplacement (celui des blancs par les Africains), qu'il a légendé d'un «triste réalité». Diatribe classique, mais le dessin partagé a été mis en ligne par Alexandre Gabriac, fondateur des Jeunesses nationalistes (groupuscule aujourd'hui dissout) et ancien membre du Front National, exclu du parti en 2011 pour un salut nazi.
François Helie, candidat à Dourdan (Essonne), affectionne les images à caractère raciste ou homophobe et en fait profiter ses contacts sur son mur Facebook. Comme cette fausse pub montrant un sac-poubelle transformé en «niqab jetable» qui «retient les odeurs durant 24 heures». Ce conseiller municipal a aussi partagé ce dessin d'un soldat français au Mali qui rassure un petit orphelin en lui disant : «Ne t'inquiète pas on va te faire adopter par un couple gay en France».
Serge Laroze n'aime pas trop les étrangers mais adore les mots croisés. Il a conjugué ses deux talents. Candidat à Toulouse 11, ce retraité de l'aéronautique a fait parler de lui lors des dernières municipales en publiant une grille confectionnée par ses soins, où il donne par exemple sa définition d'un Rom : «Fait fortune dans le rempaillage de chaises et le commerce du cuivre.» Ou encore cette définition du quartier de Bellefontaine : «Quartier sensible, centre de recrutement du Djihad et dont le nom évoque un bel écoulement d'eau». Le candidat s'était défendu en disant que c'était de l'humour. Depuis, la page n'existe plus sur le site départemental du FN.
François Jay, candidat à Bordeaux 1 sous l'étiquette du SIEL (Souveraineté indépendance et libertés, parti associé au FN), s'attaque à «l'occupant». Dans un message posté l'été dernier, il théorise sur le «grand remplacement», une «invasion» à ses yeux, en appelant à rejeter «ceux qui nous envahissent», et prônant une solution radicale : «Pas d'emploi, pas de logements, pas de collaboration avec l'occupant, telle devrait être notre attitude.» Dans un autre post, il réclame l'interdiction du Coran.
Jacques Coutela se présente à Tonnerrois (Yonne). Il avait été exclu temporairement du FN après avoir affiché son admiration pour le terroriste norvégien Anders Breivik, qui avait assassiné 77 personnes en 2011. Sur son blog, (intitulé «La valise ou le cercueil»), il avait publié un article qualifiant le tueur de «premier défenseur de l'Occident», un «Charles Martel 2» et avait appelé à en faire «une icône». Dans un second article, il apportait une rectification : Breivik «n'est pas une icône, mais simplement un visionnaire face à la montée de l'islamisation de l'Europe.»
Un candidat voisin, Frédéric Richou, qui se présente dans la circonscription de Bordeaux 2, dit ce qu'il pense des immigrés, ou Français issus de l'immigration, et qu'il appelle le «Niquetamère», cet «animal peureux». Précisément, ce conseiller aux prud'hommes a partagé cette définition sur sa page Facebook, le 18 février. Mais si le texte n'est pas de lui, son commentaire laisse peu de doute sur son opinion (et sur son niveau en orthographe) : «Très belle définitions a méditée». Que signifie le mot France pour lui ? «F.R.A.N.C.E. : Fédération des réfugiés Arabes Nourris par les Caisses de l'Etat.» Et aussi : «Il se reproduit rapidement en milieu européen.» Une dernière : «La femelle peut mettre bas entre 10 et 15 "niquetamères" dans sa vie.»
Mikaël Pinton, candidat dans le canton de Vitré (Ille-et-Vilaine) se réfugie derrière l'humour – un classique frontiste – pour exprimer son islamophobie sur son compte Facebook. Et fait étalage de ses faits d'armes : «Ce matin, aux courses, je me suis amusé à mettre des côtes de porc dans le rayon halal, histoire de… il y aura peut-être un muzz courageux pour les acheter.» Et il relate des blagues qui suintent le racisme.
Mikaël Pinton risque l'exclusion du FN, non pas pour ces blagues, mais pour avoir posté l'image de Pierre Bergé et Dounia Bouzar avec une cible sur la tête, parce qu'ils s'étaient tous deux prononcés pour une révision des jours fériés religieux. Le Journal de Vitré avait également repéré des messages racistes à l'égard de Christiane Taubira qui ont depuis été effacés. Il a été suspendu du parti, avant une prochaine convocation devant une «commission de discipline», a indiqué le directeur de la campagne des départementales au FN. Nicolas Bay a également précisé que l'exclusion ne faisait guère de doute : «Je ne suis ni raciste ni islamophobe», a tenu à préciser Mikaël Pinton au Journal de Vitré.
Patricia Chalamet, candidate à Buzançais (Indre), associe dans un post homophobe, publié en mai 2014, le mariage pour tous à un «blanc-seing à toutes les perversions».
Roger Dohen, candidat dans le canton de Marck (Pas-de-Calais), n'aime pas les homosexuels. En 2012, ce pêcheur de 67 ans poste un statut Facebook avec ce message : «Le mariage = un homme une femme. Ils en veulent toujours plus ses PD.»
En mars 2014, il publie une photo prise furtivement depuis une voiture, montrant des personnes patientant à un arrêt de bus. Suivi de son commentaire. «Ils sont partout et de plus en plus paraît que s'est bon pour la France UMPS, en attendent les calaisiens paye pour nourir ses gens.»
A Calais, le candidat Kevin Reche, qui a fondé le collectif «Sauvons Calais», est un «nationaliste» de 20 ans tatoué au cœur d'une swastika, façon Vignard dans American History X.
Alexandre Larionov, candidat dans le canton de Causse-Comtal (Aveyron), ouvertement antisémite, dénonce la mafia juive dans un message posté sur Facebook en août 2014 : «La france est un pays controllé par les Grans Loges, l'argent que les Français gagnent partent dans les poches de ces gens. […] Ils veulent détruire les races nordiques.» Après cette révélation par le site anti-FN L'Entente, il a été exclu du FN en février. Le FN s'étant rendu compte de la chose trop tard, Larionov reste candidat, mais le parti a indiqué qu'il ne pourvoirait pas le canton en bulletins à son nom.
Gilles Ferrière se présente à Plélo (Côtes d'Armor). En novembre 2012, on peut lire sur sa page Facebook personnelle, à propos du mariage pour tous : «La démocratie voudrait que tout le monde s'exprime et non une minorité pédophile.»
Il est également fan de la page Facebook SOS Souveraineté la révolte des Vaches à Lait, dont l'objectif est de « Rendre le pouvoir aux français (Les vrais, pas ceux qui prennent la nationalité comme une carte de séjour à durée indéterminée…)». On y trouve des appels à la haine des Roms, notamment le jeune Darius, tabassé en juin 2014 par des jeunes de Pierrefitte-sur-Seine, et retrouvé agonisant dans un chariot à roulettes : «On pourrait aussi arrêter [son] traitement […], non ? D'autant plus que le parasite n'a jamais cotisé à la sécu ou même payé une assurance…»
Rectificatif : dans une version précédente, nous écrivions que Gilles Ferrière était candidat FN à Billom (Puy-de-Dome). Il s'agit d'un homonyme, il y a deux candidats frontistes nommés ainsi, l'un en Auvergne, l'autre en Bretagne. La page Facebook personnelle mentionnée ci-dessus est bien celle de Gilles Ferrière, candidat à Plélo.
Philippe Sokolowski, leader du FN à Bellegarde-sur-Valserine (Ain), déclarait lors d'une interview à La Tribune Républicaine en 2013 : «Nos valeurs judéo-chrétiennes sont en train de disparaître de la ville. Je pense que dans six ans, ce sera Bellegarde la salafiste ou la djihadiste ! On peut aussi mettre un minaret sur la mairie. On est en train de brader la commune.» En mars 2012, il diffuse une lettre raciste à destination de François Hollande (supprimée depuis du site du FN de Bellegarde), comme le rappelle le site Alkanz.
Maxime Chaussat, candidat dans l'Ain et responsable départemental du FN, retweete des messages du type «Le seul véritable apartheid existant en France est celui que subissent les patriotes pour exprimer leur amour de la France historique». En 2011, rappelle Le Lab, il avait été condamné pour un tag raciste, «Islam dehors», accompagné d'une croix celtique.
Dans l'Allier, le chanteur de charme et candidat FN Xavier Sainty s'est récemment illustré dans un post Facebook où il expliquait que si sa carrière ne décollait pas, c'était parce qu'il n'était pas juif. Sur sa page Facebook, il a posté ce message le 14 février : «Même dans le show-biz je suis bloqué partout, et un producteur juif […] me l'avoue directement […] il m'a dit «comme tu n'es pas juif tu n'auras jamais droit aux télés aux radios et tu seras barré car nous avons l'argent et tout nous appartient, tu ne pourras jamais y arriver» !!! Voilà comment nous sommes traités par ces gouvernements depuis des décennies, nous les «goys», vivement une vraie révolution française […] vive Marine Le Pen vite !!!»
Un post partagé par une autre candidate, Corinne Mossire, qui se présente dans le canton Mâcon-1 en Saône-et-Loire.
Eric Pinzelli, candidat à Château-Arnoux-Saint-Auban (Alpes-de-Haute-Provence), a invité ses lecteurs à «sauver la France». Historien et contributeur régulier au site d'extrême droite Boulevard Voltaire, il a posté un message il y a trois mois sur la «déferlante de l'islam» qui a «envahi» la France : «Si vous n'êtes pas encore enthousiastes à l'idée de voir nos cathédrales dynamitées et de vivre dans une société régie par la charia, aujourd'hui est le temps de dire halte au processus de déchristianisation, halte à la réécriture de notre Histoire.»
Jean-Jacques Guitard, candidat à Beausoleil (Alpes-Maritimes), mêle sur son compte Twitter islam et islamisme : «Il est temps d'arrêter de faire de l'angélisme envers l'islamisme même si l'islam de France doit en payer le prix. STOP!!!»
Même amalgame de la part de Julien Clos, qui se présente au Cannet (Alpes-Maritimes). Après la tuerie à Charlie Hebdo, il publie sur son compte Twitter : «Attentat islamique ce matin, je suis de plus en plus inquiet concernant la #Mosquee clandestine du #Cannet. #ALERTEISLAM»
Lydia Schénardi, candidate à Contes (Alpes-Maritimes), mélange boucherie et homoparentalité, rapporte Nice-Matin. Interrogée par des étudiants en journalisme en 2013, elle demande : «On parle de la traçabilité de la viande mais est-ce qu'on pense à la traçabilité des enfants ? Un enfant qui nait dans un couple homosexuel, qui se sépare par la suite, les grands-parents qui sont-ils là-dedans ?»
Jonathan Vivien, suppléant à Arras, donne sa définition du mot «Algérien» : «Maladie mentale consistant à se promener avec un drapeau, brûler des voitures et crier "one two three, viva Algeria"». Sa page Facebook, repérée par L'avenir de l'Artois, est «un véritable déferlement de haine et de blagues» à l'encontre des musulmans arabes, rapporte le journal.
Aimé Deléglise et Chantal Clamer, candidats à Pamiers (Ariège), s'accordent bien. Le premier, adepte de blagues racistes, qualifie Christiane Taubira de «banane sur pattes» dans un post publié sur Facebook en avril 2014. La seconde s'est déjà fait épingler pour ses propos homophobes, racistes et islamophobes. La candidate s'est illustrée en janvier 2014 en écrivant, sur son compte Twitter, que «l'islam et les Mahométans sont la nouvelle peste bubonique du XXIe siècle, à combattre à éliminer isans hésitation par tous les moyens possibles». Puis, dans un autre tweet, elle a évoqué des «sales gouines vraiment moches», dont seuls voudraient «les blacks et les rebe».
Thierry Cumps, candidat FN/RBM (Rassemblement Bleu Marine) à la Courneuve, écrit des livres et les publie à compte d'auteur. Comme celui-là : «Bienvenue en France islamique». Il y théorise un délire complotiste, expliquant très savamment sur son blog comment le président français se prépare à convertir la France en terre islamique. Car «François Hollande en est convaincu : le socialisme est incapable de faire respecter les lois en France, seul l'islam en tant que force politique et pas seulement en tant que religion est capable de diriger notre pays.» Il existe selon lui «de nombreux signes quant à la volonté d'implanter en France un gouvernement islamiste modéré de type algérien ou marocain par François Hollande.» Comme celui de nommer une «marocaine musulmane Najat Vallaud-Belkacem comme ministre de l'éducation nationale».
Si Hollande fait la guerre à l'Etat islamique, c'est dans un but très précis selon lui : «Encourager le terrorisme islamique en France afin d'utiliser des petits criminels pour des attentats sur le sol français, ce qui amènera la population française et les députés à accepter des lois liberticides qui permettront de changer la république démocratique française en république islamiste.» Voilà.
Loïc de Fleurelle, 68 ans, est candidat en Ille-et-Villaine, Canton de Rennes. Le 1er décembre 2014, ce militaire à la retraite écrit sur Facebook comparer souvent De Gaulle à Pétain, même s'il ne nie pas que l'homme de Verdun «et surtout Laval ont eu des actes détestables vis-à-vis des juifs». «Il faut repeupler recoloniser l'Afrique et la repeupler avec nos immigrés !».
Au sujet de la supposée «dégénérescence» de la société occidentale : «la légalisation de l’avortement et sa banalisation [...], un drame bien plus atroce que la Shoah».