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Libération
Interview

«Je suis blanchiste, neutralité complète»

En 2012, ils ont voté Hollande, mais ce dimanche...
publié le 20 mars 2015 à 19h56

«Bien sûr, j’ai voté Hollande en 2012, et bien sûr je suis déçu. Les politiques, s’ils veulent qu’on s’intéresse à eux, il faut qu’ils s’intéressent à nous. Les abstentionnistes leur envoient ce message, mais les politiques n’entendent pas. Ils ne s’intéressent aux gens que pendant les campagnes électorales. Le reste du temps, ils sont dans les hauts lieux, ils bouffent du caviar.

«Comme je n'ai jamais raté une élection, cette fois-ci je voterai blanc. Cette année, je suis blanchiste, neutralité complète. J'ai envie de dire aux gens, "Français, réveillez-vous, révoltez-vous". Il faut descendre dans la rue, ça doit être Mai 68. Quand j'en ai vu 4 millions dehors pour les 17 morts des attentats, je me suis dit qu'il fallait qu'on soit 4 millions à sortir, mais cette fois pour l'emploi, pour le pouvoir d'achat. Il faut s'attaquer aux vrais problèmes. Sans être allé manifester et sans être "Charlie", je me suis senti concerné par ces 17 personnes et par leurs familles. Je pense que les jihadistes, c'est la société française qui les a fabriqués. Pas de travail, pas d'avenir, ça radicalise. Ils n'ont pas de paradis, ils vont vers l'enfer, c'est-à-dire la drogue, la délinquance, ou le jihadisme. On ne naît pas jihadiste ou délinquant, on le devient. Les gens cherchent un logement, on les envoie dans des ghettos, ils élèvent leurs enfants là-dedans. Il y a quelqu'un qui disait : "La France, tu l'aimes ou tu la quittes." Moi je pense qu'il faut que la France donne envie de l'aimer. Il faut qu'elle se cicatrise. Vous trouvez normal qu'il ait fallu le film Indigènes avec Jamel Debbouze pour que Chirac découvre l'injustice des pensions des anciens combattants des colonies ?

«Dans les années 70, on se souciait pas du Black ou du Beur d’à côté, il y avait du boulot. En 1981, j’étais euphorique. J’avais cette gauche en moi, j’y croyais. Je pensais qu’elle allait résoudre les problèmes des gens : logement, travail, formation. Et puis on a créé le RMI. C’était bien, mais ça a anesthésié le peuple. On a dit aux gens : "Calmez-vous, restez dans votre coin, et on vous laisse faire votre business parallèle." Ça s’est solidifié comme du ciment et maintenant c’est trop tard.

Dans le même temps, on est en train de tout mélanger. C’est quoi cette histoire de porc à la cantine de Chalon-sur-Saône ? Sarkozy veut créer un choc politique, ramener vers lui l’électorat FN, vous vous rendez compte jusqu’où on va ? Alors qu’il faudrait faire le contraire. Plutôt que de stigmatiser la religion musulmane, il faut s’unir, résoudre les problèmes. Quatre millions dans la rue, et tout le monde rentre chez soi ? Tout recommence comme avant ? Ce n’est pas possible. Les politiques, on les a vus côte à côte dans la manifestation du 11 janvier, de tous bords, sauf le FN, pourquoi ils ne pourraient pas faire pareil pour lutter contre le chômage et pour le pouvoir d’achat ? Un gouvernement de coalition, avec un intérêt commun, la France ? Pourquoi ils ne sont pas dans la même logique ?»

(1) Le prénom a été modifié