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analyse

Départementales : ils auront gagné si...

Le point sur les ambitions, plus ou moins raisonnables, de chaque parti.
Bernadette Chirac, candidate à Brive 2 le 19 mars. (Photo Mehdi Fedouach. AFP)
publié le 22 mars 2015 à 19h08

Dimanche soir, un seul mouvement pourra prétendre à l’étiquette de «premier parti de France». Mais ils seront peut-être plusieurs à pouvoir afficher des motifs de satisfaction — et pourquoi pas à se dire gagnants quand même. Le point sur les ambitions, plus ou moins raisonnables, de chaque parti.

  Le FN a gagné si…

Il arrive en tête au niveau national

Même symbolique, un tel résultat lui permettrait de revendiquer l’étiquette de «premier parti de France» acquise à l’issue des dernières élections européennes. Et de se poser en meilleur opposant à François Hollande, par-dessus la tête de l’UMP. Presque de quoi faire oublier que le parti frontiste sera sans doute largement distancé en termes d’élus à l’issue du second tour. Et quand bien même il n’arriverait pas premier, il pourrait se satisfaire d’un score égal ou supérieur à 25% — soit celui qu’il avait réalisé aux européennes. Une telle performance achèverait d’en faire l’égal du PS et de l’UMP en termes de potentiel électoral. Et installerait définitivement le tripartisme dans la vie politique française. Seul écueil : même premier, le FN ne sera peut-être pas en mesure d’emporter un seul département au second tour.

Il progresse hors de ses zones de force

Ses meilleures performances, le FN les attend dans ses bastions habituels du sud-est, du nord et du nord-est. Des progrès significatifs dans d’autres régions manifesteraient un véritable changement de dimension pour le parti — notamment dans l’ouest, où il souffre d’un déficit d’implantation et n’a jamais vraiment brillé jusqu’alors. La disparition de ces «zones blanches» signerait le succès de la stratégie de maillage territorial du FN, l’une des priorités de Marine Le Pen depuis son accession à la présidence du mouvement.

Il tire profit de la hausse de la participation

A abstention forte, FN au plus haut : l’équation a longtemps semblé évidente - illustrée, notamment, par la présidentielle de 2002. Les choses ne sont plus si claires aujourd’hui. On l’a constaté lors de la récente législative partielle du Doubs : le Front National peut, lui aussi, tirer profit d’un sursaut de la participation. On verra ce qu’il en est à l’occasion de ces départementales, où les électeurs semblent plus mobilisés que pour la dernière édition. Le vote FN suivra-t-il la même tendance ? Ce serait de bon augure pour le parti dans la perspective des seconds tours.

L’alliance UMP-UDI a gagné si…

Elle devance nettement le FN

Avec son alliée UDI, elle améliore sensiblement son score de 2011 : 31,7%, ce qui était le plus mauvais score de la droite à une élection cantonale depuis le début de la Ve République. «Nous pouvons être devant le FN, c'est un objectif atteignable», déclarait la semaine dernière Nathalie Kosciusko-Morizet. Mais il ne suffira pas d'être légèrement devant pour crier victoire. Encore faut-il que ce soit suffisamment net. Un score de moins de 35% pour la droite unie serait objectivement une contre-performance.

Elle est en mesure d’emporter au second tour une trentaine de départements

Tout au long de cette campagne, les amis de Nicolas Sarkozy ont délibérément minimisé leurs objectifs. Le secrétaire général de l’UMP est allé jusqu’à prétendre que la conquête d’une dizaine de départements serait une victoire. En vérité, la droite et le centre en attendent au minimum une vingtaine, ce qui permettrait d’inverser la domination (60 départements à droite contre 40 à gauche). Compte tenu de l’élimination massive des candidats PS au premier tour, la droite peut espérer asseoir sa domination sur 80 départements. Une performance qui n’aurait rien d’historique puisque ce fut déjà le cas en 1992.

Les centristes arrivent à tripler le nombre de leurs élus départementaux

Pour l’UDI ces départementales doivent être l’occasion d’un «réancrage territorial» après les lourdes défaites des dernières années. L’UDI présente 700 candidats titulaires. Elle a bon espoir d’en voir élu plus de 500, triplant ainsi le nombre de conseillers départementaux.

Le PS a gagné si…

Il résiste mieux que prévu au premier tour

Sur 2 054 cantons, les socialistes estiment qu’ils pourraient être éliminés du deuxième tour dans 500 d’entre eux, laissant la place à un duel entre UMP et Front national le 29 mars. Mais la droite et certains politologues leur président 1 000 éliminations. Si dimanche soir, le PS reste dans son étiage de 500, on ne pourra pas parler de victoire mais, aussi étrange que cela puisse paraître, d’une bonne résistance.

Il sauve 50% des meubles

A la tête de soixante départements depuis 2001, le Parti socialiste pourra s'estimer très heureux s'il en sauve la moitié - une trentaine - un résultat auquel personne ne semblait croire ces derniers jours rue de Solférino. «Dans le meilleur des cas, on en garde 35, mais dans la pire des situations seulement 18», a ainsi estimé le président de l'Association des départements de France, Claudy Lebreton. Si les socialistes conservent 35 départements, ce serait le retour à la situation de 2004, avant les vagues roses de 2008 et 2011. En revanche, 18 ferait repartir le socialisme départemental à son niveau du milieu des années 90.

EE-LV a gagné si…

Les 950 candidats présents dans les 2 054 cantons passent la barre des 10 %

Lors des élections départementales, en 2011, les candidats EE-LV avaient réalisé un score global de 8%. Au vu des sondages tout au long de la campagne, et des premières indications du jour, il ne serait déjà pas mal de réaliser un score similaire…

L'alliance avec le Front de gauche titille le PS

Dans 45% des cas, les candidats EE-LV se présentent avec l'une des trois composantes du Front de gauche : le Parti de gauche, le Parti communiste et Ensemble. Une première. Les cantons «rouge-vert» seront observés de près. Objectif : réaliser un gros score, voire dépasser le PS, afin de redistribuer les cartes à gauche quelques mois avant les régionales.

L'alliance avec le PS permet à la gauche de conserver quelques départements en danger

Pendant que plus de 80% des candidats EE-LV affrontent le PS seul ou avec le Front de gauche, 18% d'entre eux sont alliés avec le Parti de la rose. Signe que les alliances chez les Verts se font en fonction des régions et des départements. Et tant pis si l'électeur écolo se perd… La plupart des alliances avec le PS se trouvent en Seine-Saint-Denis, dans l'Essonne, en Meurthe-et-Moselle et dans le Loiret. Dans l'Essonne par exemple, maison de Manuel Valls, la droite est menaçante et favorite. Une gauche éparpillée dès le départ aurait laissé une autoroute à la droite. Avec cette alliance la victoire reste très compliquée… Mais possible.

Le Front de Gauche a gagné si…

Si son alliance avec EE-LV fonctionne et dépasse le PS dans plusieurs cantons d’un côté. Et que le Parti communiste conserve les deux derniers départements qu’il dirige, de l’autre : le Val-de-Marne, district de la petite couronne parisienne, dirigé par le PCF depuis 1976 et l’Allier, enclave rurale du centre du pays. La tâche s’annonce difficile. Dans le Val-de-Marne, comme presque partout, la gauche part divisée. Et la droite est plus forte que dans le passé avec le redécoupage des cantons. Dans l’Allier, la gauche est moins divisée, mais la droite, qui a perdu le département lors des dernières élections, s’accroche pour récupérer la présidence… Le sprint final s’annonce tendu.