Balayée dans la moitié des cantons au premier tour, la gauche sait qu’elle va perdre le Nord. Grosse claque: les électeurs de gauche sont invités à aller voter à droite pour faire barrage au FN dans plus de la moitié des cantons. Le FN, premier parti dans le Nord, grimpe haut à Dunkerque-1 (43%), face au PS, à Anzin (39%) face à la droite, à Tourcoing-1 (35%) face à l’UMP, à Aulnoye-Aymeries (38%) face au Parti communiste, à Aulnoy-les-Valenciennes (35%) face au Front de gauche.
Les Nordistes obéiront-ils au mot d’ordre des états majors qui appellent à faire barrage au Front national en votant pour le candidat «républicain»? Selon la Voix du Nord, Laurent Coulon, candidat dans le canton du Cateau-Cambrésis, arrivé en troisième position derrière le FN (38%) et l’UMP (35%), a refusé de se retirer d’une triangulaire malgré la consigne du premier secrétaire de la fédération socialiste. Christian-Marie Wallon-Leducq, politologue spécialiste du Nord: «On est dans une situation paradoxale. La gauche est dans l’impossibilité mathématique de l’emporter, mais la droite n’est pas la première force politique du département. Le second tour pourrait être plus ouvert, et l’assemblée moins facile à gouverner que prévu. On n’est pas complètement sûr que la droite l’emportera dans les duels avec le FN. L’électeur de gauche pourrait être tenté de rester chez lui, car il y a le sentiment que cette attitude n’est pas réciproque chez les électeurs de droite».
Même si, au contraire de Nicolas Sarkozy, le candidat Jean-René Lecerf (UMP), probable futur président du département, élu dès le premier tour dans le canton de Lille-2, l’avait annoncé avant le premier tour: pas de «ni-ni» dans le Nord. Résultat: la droite n’a pas la garantie de la majorité absolue. Jean-René Lecerf appelle à voter communiste ou Front de gauche pour faire barrage au FN et a toujours juré qu’il ne gouvernerait pas avec l’extrême droite.
Au PS, on tente de garder la tête haute. Gilles Pargneaux, premier secrétaire, prend acte de la défaite et refuse de la mettre sur le compte des «divisions à gauche». Il y voit une réponse à «la politique de la gauche» au pouvoir, dans la continuité de la défaite des municipales. A ceux qui prônaient une alliance de premier tour avec le Front de gauche, il répond que le Parti de gauche et le Parti communiste «ont fait campagne contre le gouvernement». Il appelle à une «réflexion» interne, et reproche, sans vouloir en dire plus, à certains «potentats locaux» des «lourdeurs dans la mise en action des socialistes», face à des adversaires à droite qui ont «de l'avenir». On pense à Tourcoing et à son jeune et nouveau maire UMP, Gérald Darmanin, qui porte un renouveau à droite. Le premier secrétaire, proche de Martine Aubry, insiste: «Et pour les régionales, au vu des résultats dans la Somme, dans l'Aisne, où c'est parti pour basculer à droite, et dans l'Oise, je ne l'espère pas, à l'extrême droite, ça semble difficile, si rien ne change. Je vois mal comment on peut gagner l'élection en décembre.»
Du côté des communistes et du Front de gauche, on n’est pas mécontent. Le pari de l’alliance avec Europe Ecologie-les Verts est réussi dans certains cantons, comme à Lille, où l’attelage dépasse les 30% dans certains bureaux, au coude-à-coude avec le PS. Fabien Roussel, secrétaire fédéral du Parti communiste: «Les résultats sont bons pour le Front de gauche et ses partenaires. Dans le contexte actuel de déception envers la gauche, on obtient 12,5% dans le département, dans une gauche au total à 35%. Il va falloir compter avec nous.»