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La gauche s'accroche au Pas-de-Calais

Tous les partis le reconnaissent : le PS et ses alliés devraient conserver le département, dimanche. Toutefois, la majorité absolue est loin d'être garantie.
Le conseil départemental du Pas-de-Calais, à Arras, le 9 mars. (Photo Philippe Huguen. AFP)
par Stéphanie Maurice, LILLE, de notre correspondante
publié le 24 mars 2015 à 13h44

«Ça va le faire.» Michel Dagbert, le président PS sortant du conseil général du Pas-de-Calais, croise les doigts et appelle au sursaut républicain : il espère bien que la gauche, enfin réunie au second tour des départementales, garde sa majorité absolue. Malgré l'arrivée en tête du FN dans 20 cantons sur 39, il ne craint pas une bascule du département dans l'escarcelle du parti d'extrême droite. «La gauche sera devant le Front national», affirme-t-il. Une analyse partagée par les autres partis. Pour Philippe Rapeneau, secrétaire départemental de l'UMP, le FN victorieux dans le Pas-de-Calais, «c'est hors de question, juste impensable». De son côté, Bruno Bilde, conseiller spécial de Marine Le Pen, ne voit que «10 cantons au-dessus de 40%», potentiellement gagnables, dont 4 à 5 pratiquement assurés, concentrés dans le bassin minier (Wingles, Lens, Douvrin et les deux cantons de Hénin-Beaumont). Il veut rester prudent, mais ne prévoit pas le Pas-de-Calais passer au FN.

«Vote homogène»

Là où les visions diffèrent, c'est sur l'ampleur de la poussée du Front national lors de ce premier tour des départementales. Il arrive en tête des suffrages, avec 35,6%, devant l'Union de la droite, à 17,13%, et le PS, à 16,71% (auquel s'ajoute le score de l'Union de la gauche à 10,77%). Pour Bruno Bilde, «le vote FN est très haut et très homogène sur l'ensemble du territoire : nous sommes présents au second tour dans tous les cantons.» C'est aussi la constatation du politologue Christian-Marie Wallon-Leducq. Les résultats de dimanche sont «une confirmation d'une implantation déjà repérée en 2014, qui est désormais plus étale sur le département», affirme-t-il. Le PS relativise pour sa part la montée frontiste : «Le Front national gagne seulement 16 875 voix par rapport aux européennes, quand le PS fait 82 080 voix de plus, et l'UMP 51 783 voix supplémentaires», note Michel Dagbert.

«Tentation forte»

Mais l'enjeu est ailleurs. «Il s'agit de savoir si le département sera gouvernable, car à mon avis, les majorités seront très courtes», affirme Bruno Bilde. Déstabiliser la gouvernance socialiste, c'est aussi l'objectif de l'UMP. Philippe Rapeneau a fait ses comptes : «On peut avoir 14 ou 15 cantons maximum sur 39. Cela se jouera à un canton ou deux, mais la gauche pourrait n'avoir qu'une majorité relative.» Dans ce cas, il déclinera toute participation à l'exécutif du département – pas d'alliance avec le parti socialiste, donc –, mais imagine peser sur les délibérations lors des votes. Pour Christian-Marie Wallon-Leducq, le cas du Pas-de-Calais ne sera sans doute pas totalement réglé dimanche prochain : il faudra attendre un troisième tour, celui de l'élection du président du conseil départemental. «Le Front national a désormais une implantation qui peut lui faire jouer un rôle politique important, explique-t-il. Il va tenter de convaincre l'UMP qu'ils sont des alliés nécessaires. S'il y a une majorité concevable à droite, la tentation pourra être forte.» Un scénario peu probable, dit-il, mais qu'«il faut garder au coin du feu».