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Libération
TRIBUNE

Les jeunes absents

par Antoine Dulin, Membre du bureau du Conseil économique, social et environnemental
publié le 25 mars 2015 à 17h11

Près de 64% d'abstention chez les jeunes de moins de 34 ans aux départementales et ils sont nombreux, parmi les votants, à avoir choisi le bulletin du parti d'extrême droite. Un peu plus d'un jeune sur trois aurait donc encore confiance dans les élections. Quelle démocratie laissons-nous à nos enfants ? Le sociologue, Louis Chauvel, l'avait déjà écrit en 2011 : «Dans les sociétés vieillissantes, la surdité aux problèmes sociaux des générations à venir peut devenir un vrai souci.» Beaucoup avaient cru qu'avec l'élection de Hollande, qui a fait de la jeunesse une priorité de son quinquennat, les choses allaient changer. Certes, un plan Priorité jeunesse avec des objectifs ambitieux (permettre, à tous les jeunes, d'accéder aux droits communs a été annoncé - la France est l'un des derniers pays de l'UE avec le Luxembourg à interdire l'accès au revenu minimum aux moins de 25 ans alors qu'il a été prouvé que le RSA n'avait aucun effet désincitatif pour l'emploi). Mais le constat est alarmant : les jeunes de 18 à 29 ans sont les plus touchés par la pauvreté (1 sur 5, soit près de 1,9 million), plus de 1,5 million ne sont ni en emploi ni en formation, 30% ont renoncé à des soins pour raisons financières. Plus de 70% connaissent des problèmes de logement, et parmi eux, 30% doivent rester chez leurs parents.

Depuis trente-cinq ans, les décideurs politiques et les partenaires sociaux n’ont opté que pour un enchevêtrement de dispositifs ciblés en fonction de critères d’âge, de statuts, de lieux d’habitation. Ceux-ci ont en grande partie échoué et la précarité est devenue la norme de l’entrée dans la vie active pour beaucoup de jeunes. L’âge moyen du premier CDI, signe de stabilité, se situe entre 28 et 29 ans, il était à 22 ans en 1992. Le diagnostic est connu depuis de nombreuses années, pourtant il est plus facile de parler du vieillissement et de dépendance que de la jeunesse, qui reste l’angle mort des politiques publiques. Montrons que la société est capable d’investir pour la jeunesse, de lui faire confiance et lui permettre de participer à l’élaboration des politiques et des décisions dans les collectivités, dans l’administration, dans les partis mais aussi dans le monde de l’entreprise et le monde associatif.

Rapporteur de l'avis «Sécuriser les parcours d'insertion des jeunes» présenté le 25 mars.