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Libération
Analyse

Le PS veut voir les urnes à moitié pleines

A gauche,difficile de masquer la défaite, dimanche. Pourtant…
Claude Batolone et Manuel Valls à Noisy-le-Grand, le 23 mars. (Photo Albert Facelly)
publié le 27 mars 2015 à 19h56

Dimanche soir, «dire qu'on a gagné vingt départements, ça voudra quand même dire qu'on en a perdu quarante», glisse un député socialiste, refusant par avance tout nouveau «détournement» des résultats des départementales. Il y a huit jours, le Front national n'arrivant pas en tête du scrutin, Manuel Valls et les dirigeants du PS s'étaient précipités pour «encoder le premier tour», selon l'expression de l'un d'entre eux. Imprimer la lecture la plus rose possible des enseignements du scrutin, au risque du déni électoral. Selon le PS, les trois leçons étaient limpides : le FN est contenu, Nicolas Sarkozy n'apporte pas de voix supplémentaires à l'UMP et, surtout, avec un PS aux alentours de 22%, les portes de 2017 s'entrouvrent… à condition d'aller chercher trois points supplémentaires.

Dimanche, la mystification politique sera plus compliquée voire impossible : la France sera - intégralement ou presque intégralement - bleue. Avec, peut-être, une épine noire. Mais mardi, en bureau national, les ténors du PS se sont entendus pour dramatiser et faire croire que le PS n'allait sauver que 20 départements sur 61 pour pouvoir plastronner dès que cette barre sera passée. Sauf que 20 départements, ce serait en dessous du plus bas historique pour un scrutin départemental : 21 conseils généraux en 1992, un an avant les législatives les plus catastrophiques de l'histoire de la gauche au pouvoir. Vingt départements conservés, «c'est ce qu'on nous a dit qu'il fallait dire, confesse un député. Mais avec des reports convenables, on peut monter à 27». «C'est sur la tranche de la pièce, ça tombe d'un côté ou de l'autre», estime une ministre qui voit certains départements se jouer au canton près.

Le premier tour avait été marqué par un sursaut de mobilisation et certains sur le terrain jugent qu'il va se prolonger dimanche. «Beaucoup de gens qui n'ont pas voté nous disent qu'ils viendront, raconte le député de l'Ardèche Olivier Dussopt. Le discours de Sarkozy sur les repas sans porc et le reste a eu un impact. Les gens nous disent : "Les candidats de Sarkozy, on n'en veut plus."» Tout en continuant sa croisade contre le Front national, Manuel Valls a concentré ses coups contre le président de l'UMP et sa «faute morale et politique» consistant à refuser d'appeler à faire barrage à l'extrême droite. Nicolas Sarkozy ayant fait du Premier ministre sa tête de turc privilégiée en meeting, ce dernier ne s'est pas gêné dans les attaques. «Bateleur jamais, insulter les gens jamais, a-t-il revendiqué vendredi. Moi, je n'ai jamais traité quelqu'un de "pauvre con", je n'ai jamais dit qu'il fallait passer la banlieue au Kärcher.» 

Dans la dernière ligne droite, après la nationalisation du scrutin, sa stratégie de premier tour, Valls est revenu aux fondamentaux: faire la «différence» entre un département de gauche et un département de droite. Et bien sûr insister sur la désunion, catalyseur du recul de la majorité au plan départemental.

A gauche, tous disent vouloir conjurer l'éparpillement avant les prochains rendez-vous électoraux : les régionales en décembre et la présidentielle de 2017. «Le rassemblement, ça ne se décrète pas», a prévenu d'emblée le président de l'Assemblée, Claude Bartolone, dont le département sera particulièrement scruté dimanche soir. En Seine-Saint-Denis, socialiste, et dans le Val-de-Marne, communiste, une victoire aurait valeur d'exemple, prouvant que l'union peut faire gagner la gauche. Lundi, le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, recevra son homologue écologiste, Emmanuelle Cosse, premier signal d'une «ouverture» politique à venir. Pour Manuel Valls, «la gauche a son destin en main, c'est à elle de décider».

Si François Hollande et son Premier ministre semblent bien décidés à «élargir la base politique» du gouvernement, les écologistes et les proches de Martine Aubry auront du mal à poser leurs conditions. «La seule exigence que nous avons avec le président de la République est la cohérence et la loyauté», confie Valls. Pour qui «le remaniement n'est ni un hochet ni un chantage».