Une carte des départements bleue. Ce dimanche soir, le bloc de droite sort, sans surprise, grand vainqueur du second tour des élections départementales, et pourrait remporter entre 67 et 70 départements. Soit un gain de 25 à 31 exécutifs. La défaite est nette pour la gauche, qui détenait 61 départements et n'en détiendrait plus qu'entre 31 et 34. Pour autant, la gauche semble mieux résister que prévu, elle qui craignait de tomber sous la barre des 20 départements. Et ce malgré une abstention un peu plus forte qu’au premier tour, entre 49,8% et 51% des électeurs.

C'est donc une défaite pour la gauche, mais pas la raclée historique de 1992, lorsqu'elle avait chuté à son plus bas niveau, à 23 conseils généraux (dont 21 socialistes). S'il concède ce «net recul», Manuel Valls, premier à s'exprimer après l'annonce des premiers résultats, s'est réjoui de voir que «les appels à la mobilisation ont été entendus». En première ligne dans le combat contre le Front national, il s'est décerné au passage un satisfecit, rappelant: «je m'étais beaucoup impliqué, autant que j'ai pu». Mais le Premier ministre a aussi regretté «les scores très élevés de l'extrême droite, un défi pour tous les républicains»: «C'est la marque d'un bouleversement durable de notre paysage politique dont chacun devra tirer les leçons», ajoute-t-il. Le parti de Marine Le Pen, qui s'était classé deuxième derrière l'UMP-UDI dimanche dernier, ne remporte toutefois aucun département, perdant son pari dans ses deux principales cibles, l'Aisne et le Vaucluse.

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Certes, les socialistes, volontairement alarmistes entre les deux tours, faisaient mine de redouter la perte de 40 départements. Ce dimanche soir, ils peuvent donc claironner en arguant d'une défaite «moins pire que prévue». Le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, applaudissait, dans un grand élan d'optimisme, «une résistance très claire de la gauche et du PS dans son ensemble». Bruno Le Roux, patron des députés socialistes, se console à son tour: «C'est un échec puisque nous allons tomber, non pas à notre niveau le plus bas. C'est pourquoi je ne dirais pas "échec historique", mais c'est un échec sérieux.»

Mais d’ores et déjà, la très symbolique Corrèze, fief de François Hollande (à défaut d’être un bastion historique de la gauche), retourne dans le giron de la droite, après sept ans de gestion socialiste. De même pour l'Essonne, département d'élection de Manuel Valls, mais aussi les Côtes-d’Armor, à gauche depuis 1976 et la Creuse, également ancrée à gauche. Ils devraient être rarissimes, les départements faisant le parcours inverse. La gauche pourra ainsi se féliciter de faire basculer le département le moins peuplé du pays, la Lozère. Et elle parvient à conserver quelques collectivités où elle apparaissait en danger comme les Pyrénées-Orientales et les Landes. La Seine-Saint-Denis et le Pas-de-Calais restent aussi à gauche.

Les communistes, qui ne dirigeaient plus que deux départements, perdent l’Allier, gagnée par la droite, mais gardent le Val-de-Marne qu’ils président depuis 1976.

«Les Français ont massivement rejeté la politique de François Hollande et de son gouvernement. Jamais une politique n'avait autant incarné l'échec», a réagi Nicolas Sarkozy, dénonçant «le mensonge, le déni, l'impuissance» de la gauche au pouvoir. Grand promoteur de l'ouverture au centre - à une époque où Nicolas Sarkozy ne la goûtait guère, Alain Juppé, de son côté, a salué une «victoire de la stratégie d'alliance UMP-UDI-MoDem».

Modestes dans leurs pronostics, les responsables de l’opposition disaient n’espérer «que» l’inversion du rapport de forces actuel : alors que la droite détient 40 départements, elle visait donc une victoire dans une soixantaine de collectivités. Ce petit pari sera logiquement gagné. L’UMP alliée à l’UDI remporte entre autres l’Allier, la Charente, la Creuse, la Corrèze, les Côtes-d’Armor, la Drôme, l’Isère, le Jura, les Pyrénées-Atlantiques, la Saône-et-Loire, les Deux-Sèvres, le Territoire-de-Belfort ainsi que la Seine-Maritime, département du ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius. Le Nord, dominé par la gauche depuis dix-sept ans, et les Bouches-du-Rhône, après soixante ans de présidence socialiste, basculent aussi.

Le gain, sur la précédente carte des cantons, est évident pour le FN. D'un seul conseiller départemental à ce jour, le parti d'extrême droite devrait en décrocher «plusieurs dizaines», dont huit élus dès le premier tour. Si elle ne se risquait guère à faire des pronostics, Marine Le Pen, au lendemain du premier tour, avait reconnu ses espoirs de remporter le Vaucluse ou l'Aisne. Déception pour le FN : dans ces deux départements-cibles, la droite remporte une majorité relative. Dans l'Aisne, la droite obtient une majorité relative (avec 18 sièges, contre 16 pour la gauche et huit au FN). Et dans le Vaucluse, terre d'élection de la députée Marion Maréchal-Le Pen, la droite et la gauche gagnent respectivement six cantons et l'extrême droite cinq (trois au FN, deux à la Ligue du sud). Cas de figure éclatants de majorités introuvables…

Marine Le Pen s'est félicitée que sa formation s'installe comme «une force politique puissante dans de nombreux territoires». Elle mise sur «niveau électoral exceptionnel» en vue des régionales à la fin de l'année et surtout pour la présidentielle de 2017, y voyant «le socle des grandes victoires de demain».