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Libération
TRIBUNE

Le PS ressemble-t-il à la France et à ses diversités ?

par Florence Augier, Secrétaire nationale du PS et Louis-Mohamed Seye, Secrétaire national du PS et les 1000 signataires de motion "C" "Osons un nouveau pacte citoyen et républicain"
publié le 19 mai 2015 à 17h06

Trente ans après la Marche pour l’égalité et des années de militantisme au Parti socialiste, on est encore obligés de mettre le pétard sur la tempe des instances du parti pour avoir la diversité. Nous sommes des militants comme les autres, riches parfois d’une double ou d’une triple culture qui permettent des approches différentes des problématiques socio-économiques, politiques et sociétales. Des gisements négligés par le PS qui les ignore, et refuse de partager équitablement les responsabilités.

Pour nous, la politique, ce n’est pas un métier, c’est un moyen de faire entendre notre volonté de vivre dans un monde plus juste qui ne laisse personne sur le bord de la route. La politique, c’est de mettre en lumière des problèmes, et de proposer des solutions en utilisant les outils de la démocratie.

Pour nous, la politique ne doit pas se transformer en rente de situation, car les citoyens n’acceptent plus d’avoir l’impression que certains élus ne sont là que pour les indemnités. Nous sommes membres actifs d’au moins une association œuvrant dans des domaines variés (solidarité, défense des droits de l’homme, arts et culture, sport ou éducation) tout en étant des militants du Parti socialiste, c’est la raison pour laquelle nous sommes également syndicalistes.

La diversité est un acteur important dans les quartiers populaires. C’est cette diversité qui souffre énormément des insuffisances des politiques publiques pour corriger les inégalités territoriales, sociales, culturelles, éducatives et économiques. Beaucoup de nos camarades ont cru qu’ils pourraient être écoutés et représenter le parti, pour agir dans le cadre des politiques de la ville, au cœur des projets des territoires. Ils n’avaient qu’une seule préoccupation : comment faire entendre les voix de ceux qui travaillent, produisent des richesses, cherchent, créent et innovent, de ceux qui s’engagent au quotidien auprès des jeunes dans le sport, mais aussi au service des plus démunis ? Ils ont le sentiment de n’avoir que des fins de non-recevoir de la part du PS, qui ne leur permet pas d’être représentés équitablement ! Il existe en son sein le plafond de verre qu’ils ne cessent de dénoncer dans les autres sphères de la société.

Les raisons sont multiples, à commencer les mandats «infinis», ainsi que le cumul de mandats. Les candidats cumulent des dizaines d’années de mandats (la somme de toutes les années de tous les mandats). Les accords avec les partenaires se font sur la base de places et non de programmes d’action. Et parfois même sans aucune contrepartie en éliminant des candidatures socialistes (à moins que les partenaires disposent de candidats plus doués que les socialistes).

Les modes de désignation des candidats sont obscurs et certains parachutages inexplicables. On viole au vu et au su de tout le monde les règles de fonctionnement du parti et ses statuts (règles de candidatures quand le résultat n’arrange pas une partie, stigmatisation de certaines candidatures, faible transparence sur l’état des adhésions et des cotisations des élus). Que faire ? Un autre chemin était possible. François Hollande l’avait d’ailleurs dit, lors du discours du Bourget : le changement, c’était pour maintenant. Changer la société, changer la vie. A commencer par la fin du cumul des mandats dès maintenant et la limitation, dans le temps, à deux mandats successifs. Les partis politiques devraient jouer le jeu de la transparence en remettant au défenseur des droits un rapport annuel, qui ferait le point sur la question. Il y a un constat amer qui remonte du terrain.

Le PS continue à avoir du mal avec ses Arabes et ses Noirs, ses militants en situation de handicap, mais aussi parfois avec les femmes ! Et, cela à tous les niveaux de la représentation. Il suffit de voir les conseils municipaux, départementaux ou régionaux ! Ou les présidences des conseils départementaux et régionaux occupées par des femmes. Constatez-vous même : le droit de vote des étrangers aux oubliettes, 1% des parlementaires métropolitains, 5% de conseillers régionaux et seuls 14 conseillers généraux dans l’ensemble des conseils départementaux issus de la diversité. Un seul ambassadeur issu de la diversité nommé par François Hollande. Sur les 52 préfets choisis par le chef de l’Etat, seuls trois sont ainsi issus de la diversité. Sur les 140 directeurs de cabinets et chef de cabinets et leurs adjoints ou postes équivalents, seuls 5 ont des noms hors Union européenne. Et, au sein même des instances du PS, sur les 203 membres du conseil national, 7 seulement sont issus de la diversité (dans certaines instances départementales : 0 représentant de la diversité), 27% des députées sont des femmes, 1 seule femme présidente de région. Seulement 6 femmes maires de villes de plus de 100 000 habitants.

Sont-ils tous incompétents, pas au niveau ? Nous ne le pensons pas, c’est la raison pour laquelle, nous tirons la sonnette d’alarme pour favoriser le parti de l’égalité réelle, qui pourra impulser la société plurielle dont nous rêvons. Pour «faire France» ensemble. Nous constatons malheureusement que le PS a du mal à mettre en musique les principes qu’il défend sur le terrain. Cette mauvaise appréhension de la question de la diversité explique, en grande partie, les échecs électoraux successifs du PS.

Demain sera un autre jour, et il appartient aux militants de peser de tout leur poids sur le parti pour faire respecter toutes les diversités. Toutes ! A cet instant, tout semble nous amener à nous inscrire dans les plus prometteuses des dynamiques militantes. Cela passera par un combat au sein de notre parti pour redonner du sens aux engagements pris, ces engagements qui nous ont faits un jour pousser à prendre notre carte au Parti socialiste.