Menu
Libération
Analyse

Foire de pognon chez les candidats à la primaire

Juppé, Fillon, Le Maire : faute d’aides du parti, les postulants font la course aux dons.
publié le 29 mai 2015 à 21h16

Gardien scrupuleux des vaches maigres, le trésorier de l'UMP, Daniel Fasquelle, ne se lasse pas de raconter comment son parti se serre la ceinture. Les frais de sondages limités à 50 000 euros, soit sept fois moins que prévu au budget. Un congrès low-cost à 550 000 euros, dix fois moins cher que celui de 2004. Et rien pour les congressistes, pas même un café gratuit. Dans ce contexte, l'extravagant Paris-Le Havre de Sarkozy en jet privé (196 km) fait un peu désordre. «Archi-exceptionnel !», jure Fasquelle.

Dette. Après comme avant sa «refondation», l'UMP reste plombée par une énorme dette de plus de 70 millions d'euros, en partie creusée par les fausses factures de Bygmalion. Dos au mur, Nicolas Sarkozy a pris en main les négociations avec les banques. Il leur demande de repousser après l'élection présidentielle les échéances prévues (11 millions en 2016, 27 millions en 2017). S'il doit rembourser, le parti n'a plus les moyens de faire de la politique. Or Sarkozy a de grandes ambitions. Son statut de chef de l'UMP refondée lui donne sur ses concurrents dans la course à la primaire un avantage considérable dont il entend bien profiter.

Car Alain Juppé, François Fillon et Bruno Le Maire n’ont droit à aucune subvention du parti pour leur campagne, dans laquelle ils sont déjà engagés. C’est pourquoi chacun d’eux dispose de structures de financement chargées de recueillir des fonds. Tout particulier peut donner jusqu’à 7 500 euros maximum à un parti politique. La loi n’autorise que deux donateurs par foyer fiscal. Les deux tiers des sommes versées sont déductibles de l’impôt. Ces derniers mois, les donateurs sont fortement sollicités et la concurrence fait rage entre les candidats potentiels à la présidentielle. Les dons à plusieurs partis étant interdits au-delà du plafond légal, celui qui donne à Juppé ne pourra plus donner à Fillon ni à Le Maire, ni même à l’UMP «refondée».

Expatriés. Conséquence de l'instauration de la primaire, le gâteau doit être de plus en plus partagé. Les anciens ministres puisent dans leurs épais carnets d'adresse, activent leurs réseaux, mobilisent leurs amis chefs d'entreprises. Ils soignent tout particulièrement les hommes d'affaires et les cadres expatriés, notamment à New York et à Londres, capitale des exilés fiscaux français. C'est là que la droite recrute traditionnellement ses plus grands donateurs. Fillon a pris une longueur d'avance. Avec son microparti Force républicaine, il a été le premier, dès 2012, à se mettre sur le marché. Il espère récolter près de 1 million d'euro en 2015 et 2 millions en 2016, l'année de la primaire. L'ex-ministre de l'Agriculture Bruno Le Maire s'est lancé en 2014. Son association «Avec BLM» a tout de même réuni près de 700 000 euros. Parti un an plus tard, Alain Juppé en a déjà récolté presque autant avec «AJ pour la France».

Nicolas Sarkozy, lui, a le privilège de pouvoir retarder au maximum, jusqu’à la fin de l’été 2016, son entrée officielle dans la primaire. En attendant il n’est «que» président du parti LR et donc, assure-t-il, absolument pas en campagne.