Comment rendre hommage à un personnage politique multiple et controversé comme Charles Pasqua? Depuis l'annonce de son décès lundi soir, les personnalités de droite (beaucoup) et de gauche (plus difficilement) choisissent chacune leur facette préférée de celui qui fut un pilier du RPR et de ses réseaux et qui était encore présent il y a au mois au congrès fondateur du parti Les Républicains comme l'a rappelé son président Nicolas Sarkozy.
Ce soir, la France perd l'un de ses plus grands serviteurs. - NS pic.twitter.com/fdA3fXoRXI
— Nicolas Sarkozy (@NicolasSarkozy) June 29, 2015
Pour les chiraquiens, un «gaulliste de toujours»
L'ex-Premier ministre Alain Juppé ne prend pas trop de risque en saluant «une figure de la vie politique française», le «résistant de la première heure» et le «gaulliste de toujours». Dans un tweet très factuel, il résume en trois phrases leur histoire commune : «Nous avons aux côtés de Jacques Chirac mené bien des combats ensemble. Puis nos routes ont divergé. Mais sa personnalité m'impressionnait.»
Pasqua . Nous avons aux côtés de J.Chirac mené bien des combats ensemble. Puis nos routes ont divergé. Mais sa personnalité m'impressionnait
— Alain Juppé (@alainjuppe) June 29, 2015
Pour les souverainistes, un ennemi du «mondialisme»
Philippe de Villiers, compagnon de route des combats souverainistes dans les années 90 fait le portrait d'un résistant qui «pleurait sur le pays et sa grande misère» et qui, «avec sa verve, sa gouaille, cherchait toujours une vérité française». Villiers n'est pas loin de parler de lui-même quand il salue un responsable politique qui n'a pas cherché «les opportunités» dans sa carrière et qui, «finalement», «part au moment où les faits lui donnent raison». Il en garde le souvenir d'un homme «très attaché à ses patries charnelles». Un homme qui «tenait bon sur l'essentiel» et qui avait su voir «les conséquences du déracinement et du mondialisme».
Le député Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, pleure lui «un grand de la Ve République». Il salue «le frondeur» qui a «terrorisé la pensée unique» en s'opposant à «la dissolution de la France au sein d'une Union européenne chimérique et délétère».
Pour les séguinistes, «l’autorité de la République»
Pour François Fillon, Pasqua «incarnait» rien moins que «la souveraineté» et «l'autorité de la République». Et si cela lui avait valu d'être moqué au nom de la «mondialisation heureuse», l'ancien Premier ministre affirme qu'aujourd'hui «personne n'oserait dire qu'il était totalement d'un autre temps». S'il n'oublie pas de noter que «Charles» était aussi «expert des arcanes politiques», le député de Paris préfère retenir «sa faconde qui ensoleillait la grisaille de l'univers politico-médiatique».
Gérard Larcher, président du Sénat, rend hommage à celui qui lui a «transmis son attachement sans limite à la France et aux valeurs du gaullisme» et qu'il côtoyait encore la semaine dernière dans le cadre de l'Amicale gaulliste du Sénat.
Pour la droite sécuritaire, l’homme des «forces de l’ordre»
Eric Ciotti retient d'abord que Pasqua fut «l'un des artisans de la grande manifestation de défense de la République en 1968» et que son franc-parler «faisait merveille auprès des militants». Il souligne surtout son passage au ministère de l'Intérieur: «Sa fermeté envers les terroristes, sa proximité et son respect pour les forces de l'ordre, son langage de vérité, lui ont valu la réputation d'un homme d'Etat déterminé et courageux.»
[ Éric Ciotti évoque Charles Pasqua ]
par libezap
Brice Hortefeux, ex-ministre de l'Intérieur de Nicolas dit sa fierté d'appartenir à «une génération qui a été fortement marquée par Charles Pasqua». Il rend hommage à sa capacité à «mettre sur la table» les sujets qui fâchent. Notamment sur l'immigration. Comme Nicolas Sarkozy, Hortefeux est favorable à l'abandon de l'accès automatique à la nationalité française au nom du droit du sol. Instaurée par Pasqua en 1993, cette disposition avait été abrogée en 1997, sous Lionel Jospin.
Pour la gauche, le service minimum
Le président François Hollande s'est contenté de saluer en quelques lignes «la mémoire d'un gaulliste» qui aura «animé de toute sa personnalité la vie politique française».
Un peu moins sobre, le Premier ministre Manuel Valls rend hommage au «jeune résistant», à «une voix originale et parfois controversée», au gaulliste qui incarnait, comme il se doit «une certaine idée de la France».
Jeune résistant, gaulliste, ministre, voix originale et parfois controversée, Charles Pasqua incarnait une certaine idée de la France.
— Manuel Valls (@manuelvalls) June 30, 2015
Lapidaire, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve adresse ses «plus sincères condoléances républicaine» aux proches de celui «dont la carrière politique fut notamment marquée par deux passages au ministère de l'Intérieur».
Interrogé sur France 2, le ministre des Finances Michel Sapin ne cache pas son trouble en évoquant pudiquement une «personnalité très contrastée». S'il veut se souvenir, au lendemain de sa disparition, de «la personne joviale et pleine d'entrain», il n'oublie pas de signaler sa «part d'ombre dont on a vu les traces devant les tribunaux
Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du PS évoque, lui, «le résistant» et «le grand gaulliste» qui avait «une certaine conception de la France». L'ancien jeune leader trotskiste souligne plaisamment qu'il a «connu indirectement» l'ancien ministre de l'Intérieur (1986-1988) par l'intermédiaire des forces de l'ordre. «C'était pas toujours drôle», indique-t-il sobrement sur RTL.
Jean-Luc Mélenchon, sur France Info, a évoqué le souvenir controversé de cet «homme marqué par la Résistance».
par libezap
Le jeune élu PCF Ian Brossat, adjoint à la mairie de Paris est beaucoup plus explicite; sur son compte Twitter il publie une photo de Malik Oussekine, étudiant passé à tabac et décédé le 6 décembre 1986 à Paris, en marge d'une manifestation étudiante: «lui, n'a pas eu la chance de vivre jusqu'à 88 ans», écrit Brossat, déclenchant une avalanche de réactions indignées.
En tête, ce soir, le visage de Malik Oussekine, qui, lui, n'a pas eu la chance de vivre jusqu'à 88 ans... pic.twitter.com/ZiIcwOzw39
— Ian Brossat (@IanBrossat) June 29, 2015