Ils se sont clairement réparti les rôles. A moins que ce soit une question de caractère. Mercredi, en présentant le plan de soutien à la filière agricole Manuel Valls et Stéphane Le Foll ont insisté sur «l'angoisse» du monde agricole que le gouvernement «entend». Mais le Premier ministre a aussi rendu coup pour coup face à la droite et pointé du doigt - quoique modérément - la grande distribution. Ce que le ministre de l'Agriculture «se refuse» à faire.
Pour Valls, «il y a une peur du lendemain» chez les agriculteurs, dont la colère ne faiblissait pas mercredi, provoquant des barrages et des blocages sur une grande façade Ouest de la France. «Ils contribuent à cette mission unique: nourrir les Français. L'effort, le travail le fruit de son travail, la dignité, c'est cela le monde paysan. Chacun doit pouvoir vivre de son travail», a déclaré le chef du gouvernement, entouré de cinq ministres lors d'une conférence de presse à l'Elysée. Ce qu'il faut pour le secteur, ce ne sont «ni des remèdes de circonstances ni des pansements d'urgence. Il a besoin d'un avenir».
«Na pas exploiter la détresse»
Le plan en 24 mesures et six axes (redressement des prix, restructuration de la dette, allègements de charges, généralisation de la contractualisation, soutiens à l'export et plan compétitivité) atteint 600 millions d'euros. La crise, a insisté Valls, dure depuis longtemps, «beaucoup de majorités successives» y ont été confrontées et la droite semble souffrir de «perte de mémoire» dans cette affaire. «Ne pas exploiter la détresse à des fins politiques», c'est le message du Premier ministre à tous les dirigeants du parti Les Républicains, qui accusent le gouvernement d'avoir tardé à réagir.
Valls a aussi lancé un appel «à la responsabilité de tous» pour que les éleveurs puissent gagner leur vie normalement. Consommateurs - «il faut manger de la viande française» - mais surtout «industriels et grande distribution». Le gouvernement a reçu mardi soir un rapport du médiateur des prix agricoles, chargé d'évaluer l'application de l'accord du 17 juin censé faire remonter les cours. «Il ne peut pas y avoir une course effrénée au prix bas, une captation de la valeur ajouté. C'est dans l'intérêt de tous. Exploitants, distributeurs et consommateurs», a-t-il souligné.
Interrogé dans la foulée sur les responsables de cette crise, Stéphane Le Foll a refusé de distribuer des bons et des mauvais points, semblant compter sur une hypothétique autorégulation de la profession. «Autour de la table, chacun connaît les responsabilités, les enjeux. Je me refuse à dire qui joue le jeu ou non, ce qui désignerait des boucs émissaires, a prévenu le ministre de l'Agriculture, qui a fini par rencontrer une délégation d'éleveurs mardi après-midi à Caen. Il a pointé les «raisons différentes» selon les industriels pour ne pas encore respecter l'accord du 17 juin pour justifier de ne pas taper sur qui que ce soit. «Moi je cherche à rassembler et à tenir les objectifs.»