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Libération
reportage

Fête de la rose : Frangy en Grèce

L’ancien ministre des Finances Yánis Varoufákis était l’invité du raout annuel d’Arnaud Montebourg.
(Photo Albert Facelly)
publié le 23 août 2015 à 19h36

Accueillis comme des rock stars. Sous une cohue de caméras et de photographes, Arnaud Montebourg et Yánis Varoufákis ont fait leur apparition à midi, dimanche, dans la petite bourgade de Frangy-en-Bresse (Saône-et-Loire). Sous le regard des curieux venus en nombre, les deux anciens ministres ont mis plus de vingt minutes pour rejoindre la mairie, où l’édile de Frangy les attendait pour un «accueil républicain».

Allié de poids

Un an après la «Cuvée du redressement productif», et son éviction du gouvernement, Montebourg réussit un joli coup politique et médiatique pour cette 43e Fête de la rose, baptisée «Cuvée européenne de Frangis 2015». Avec l'ancien ministre grec, Montebourg trouve un allié de poids dans sa lutte contre l'austérité. Les deux prônent une réorientation de la politique économique européenne. C'était le sens des discours tenus dans l'après-midi. Montebourg a tapé fort sur les institutions européennes : «L'austérité a été imposée par la force et le chantage contre le suffrage universel.» «On a pu voir la véritable nature de ce qu'est devenue la zone euro, c'est un tournant, poursuit-il. Tout ce qu'elle a montré fait froid dans le dos. C'est maintenant une zone tenue par une oligarchie politique.» Mais malgré sa véhémence et son discours de plus en plus eurosceptique, il ne franchit jamais le pas d'une sortie de l'euro : «Quand ça ne marche pas, il faut abandonner ou réformer. Moi, je souhaite restructurer l'Europe en profondeur.» Sur l'estrade plantée sur le stade de foot de Frangy-en-Bresse, Arnaud Montebourg propose ainsi la création d'un Parlement de la zone euro «qui contrôle l'action du président de l'Eurogroupe et de la BCE».

Son invité a pourtant rencontré, dimanche matin, Jean-Luc Mélenchon pour évoquer la tenue d'une conférence européene sur le «plan B» et une éventuelle sortie de la monnaie unique. L'ancien ministre grec des Finances a de nouveau évoqué sa volonté de fonder un «mouvement progressiste européen» tout en ajoutant qu'il n'avait jamais «évoqué une seule fois la possibilité d'un Grexit durant les négociations avec la Troïka». L'Allemagne était également dans toutes les têtes, ce dimanche. «Aucun pays n'est porteur de l'intérêt général européen, a prévenu Arnaud Montebourg. L'Allemagne défend son intérêt national, nous n'avons pas le même. Il va falloir mettre tout ça sur la table à un moment donné.»

Contre l’austérité

Viré du gouvernement pour avoir critiqué la politique économique de l'exécutif, Arnaud Montebourg est revenu à la charge : «Vous votez pour la gauche en France et vous vous retrouvez avec le programme de la droite allemande.» Plus tôt dans la journée, les deux trublions ont été rejoints par Aurélie Filippetti pour aller manger sous le chapiteau. Denis Lamard, président de l'association des Amis de la rose a ensuite remis deux bouteilles de rouge et de blanc à Yánis Varoufákis, ainsi qu'un tablier et un jean «made in France». Avant que tous se lancent dans le rituel du ban bourguignon.

Plus d'un millier de personnes ont bravé la pluie pour apercevoir les deux stars. Tous dénoncent les politiques austéritaires en Europe. Catherine et Viviane viennent pour la première fois. Elles sont là surtout «pour la Grèce et pour voir Yánis Varoufákis». Toutes deux sont déçues par Hollande : «On ne s'attendait à rien, mais il a réussi à nous décevoir.» Elles souhaiteraient que Montebourg s'engage «pour une vraie politique de gauche, pourquoi pas avec le Front de gauche. S'il part sous l'étiquette PS, ce n'est pas la peine». Martin vient pour la troisième fois. Il est proche des idées de Martine Aubry. Pour lui, faire venir Varoufákis est «une très bonne idée». «Il y a plus d'humilité que l'année dernière. Le projet européen est dans une impasse, tiraillé entre l'austérité et le populisme», regrette-t-il. Le jeune socialiste estime que Montebourg «a encore un pied en politique. Il incarne un espoir, à lui de le faire vivre». Interrogé, sur son appartenance au PS, l'intéressé a confirmé qu'il en était toujours membre et à jour de cotisation. Tout en rajoutant : «J'aimerais que ce parti soit bien différent…»