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Désintox

Violences à l'hôpital : quand LR invente une hausse des problèmes religieux

La porte-parole du parti, Lydia Guirous, met en garde contre une inflation de tensions liées à des problématiques religieuses. Le rapport sur lequel elle s'appuie ne dit rien de tel.
Les urgences de l'hôpital Saint-Joseph à Paris, en 2013. (Photo Pierre Andrieu. AFP)
publié le 25 août 2015 à 15h43

INTOX. Fraîchement nommée porte-parole de LR par Nicolas Sarkozy, Lydia Guirous (autrefois chargée des questions de laïcité à l'UMP) attaque fort sa rentrée d'intox avec son thème de prédilection : la supposée montée des revendications «communautaristes» dans les établissements de service public. Après le port du voile à l'université, ou celui de la jupe longue au lycée, elle s'inquiète maintenant d'une augmentation des violences «pour motifs religieux» dans les hôpitaux publics.

Le 21 août, elle utilise un fait divers, l'agression d'un aide soignant au CHU de Bordeaux le 9 août, pour dénoncer dans un tweet puis un communiqué une inflation des cas de violences pour motif religieux à l'hôpital public.

SINTOX. Interrogée sur ses sources, la porte-parole cite les statistiques de la Fédération hospitalière de France (FHF) et plus précisément une «étude» parue sur le site le Quotidien du médecin.fr. «Elle dit qu'il existe un problème relatif à la laïcité dans un hôpital sur trois, et un problème avec le personnel de l'hôpital dans un hôpital sur cinq […] c'est-à-dire un refus d'un médecin homme, un refus de partage de chambre, une demande de menu particulier ou d'un lieu de prière» nous explique Lydia Guirous.

L'article en question, titré «Laïcité à l'hôpital : un nombre limité de situations problématiques selon la FHF», se base en effet un rapport de la FHF. La journaliste y évoque «des situations "problématiques" relatives à la laïcité avec des patients ou leur famille dans un hôpital sur trois (32%) et avec des professionnels dans un hôpital sur cinq (20%).» Il s'agit bien de demande de menus spécifiques, d'un lieu de prière ou de prise en charge par un médecin femme… Mais aussi de crèches de Noël, ou d'affichage de l'horaire des offices religieux. «La FHF précise que certains hôpitaux ont rapporté des cas d'incivilités ou de violences qui n'ont rien à voir avec la laïcité. Certains témoignages sont la preuve d'une méconnaissance de ce qui est attendu des professionnels et des usagers», est-il nuancé dans l'article, qui n'est guère alarmiste.

Le sondage de la FHF, en accès libre sur le site de la fédération, ne l'est guère plus. Basé sur les retours des 172 établissements ayant répondu à un questionnaire, le sondage révèle bien qu'un tiers des structures ayant répondu affirment avoir rencontré, un jour, un problème lié à une question de laïcité - posé par des usagers ou par des soignants. Mais «ces remontées concernent un nombre limité de situations qui ont été accessibles au dialogue et traitées sans difficulté notable», soulignent les auteurs du rapport, publié en juin. Surtout, il n'est fait mention d'aucune augmentation de ce type de conflits, contrairement à ce que suggère Lydia Guirous dans son communiqué. «On ne tient aucun décompte de ce type de violences [liées à un problème religieux] et ce sondage ne fait pas état d'une situation particulièrement critique, explique la FHF. On s'attendait à ce qu'il y ait quelque chose, mais non. C'est regrettable d'être instrumentalisé ainsi.»