Menu
Libération
Éditorial

François Hollande la joue ultime recours

publié le 1er septembre 2015 à 19h06

Quand une situation vous échappe, donnez l’impression qu’elle sert vos intérêts ou que vous en êtes le principal instigateur (occulte, évidemment). Cette règle d’or de la communication politique est de nouveau convoquée par certains proches de François Hollande pour expliquer que l’inquiétante fragmentation de la gauche n’est en rien un handicap pour une nouvelle candidature du chef de l’Etat en 2017. Au contraire, même, elle serait la condition de son possible retour. C’est la fameuse et éternelle figure de l’ultime recours. Celle de la dernière carte qui finit par s’imposer, tout simplement parce qu’il n’y en a pas d’autres.

Voilà pourquoi plusieurs commentateurs de la chose politique se plaisent à voir, derrière la grande crise existentielle que traverse la gauche, la main souveraine et mitterrandienne de Hollande. Selon le bon vieil adage : pour régner longtemps, rien de mieux que de diviser tout le temps. En politique, une famille déchirée finirait toujours par s’en remettre à la dernière figure d’autorité. La seule capable de faire s’asseoir tout le monde autour d’une même table. Le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, braque son propre camp (et une grande partie de son gouvernement) en remettant en cause (pour la deuxième fois) la légitimité des 35 heures du gouvernement Jospin ? L’allié écologiste de début de quinquennat est au bord de l’implosion ? Le Front de gauche est en passe de se casser en deux ? Tout serait bon pour Hollande. Y compris le pire. La montée inexorable du Front national et du climat de tension au sein de la société française pourrait même être, aux yeux de certains socialistes, l’ultime justification de sa candidature. Un vote doublement utile : pour ce qui reste de la gauche et d’une certaine idée de la République.

Aujourd’hui, François Hollande laisse dire et se tait. Il fait comme si cette crise n’était pas un sujet de Président et pas encore une préoccupation de futur candidat. Il attend, jusqu’au dernier moment, que cette succession de secousses finisse de produire son travail de recomposition darwinienne. Mais à trop attendre, le chef de l’Etat prend dès maintenant le risque de commettre l’irréparable : que la gauche, fatiguée de ses propres divisions, finisse par lui retirer sa confiance. Hollande ne serait plus alors son possible sauveur, mais le principal responsable de ses déboires.