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Libération
Éditorial

Avec Sarkozy, le collectif, c’est pour les autres

publié le 13 septembre 2015 à 18h46

Installer l'équation «primaire = division», légitimer le parti en délégitimant ceux qui affichent leurs ambitions présidentielles : telle était la grande affaire de Nicolas Sarkozy et de ses lieutenants, réunis ce week-end au Touquet pour le Campus des jeunes Républicains. Sur le ton comminatoire qui lui est familier, l'ex-chef de l'Etat a affirmé que les présidentiables de droite devront, s'ils veulent participer à la primaire de 2016, oublier «leur ego» et souscrire à un «projet d'alternance» élaboré par le parti. Sarkozy sait qu'il n'a aucune chance d'être entendu. Alain Juppé, François Fillon et Bruno Le Maire vont continuer à décliner leurs propositions devant les électeurs de la droite et du centre. Ces fausses menaces n'ont qu'un but : entretenir la fougue des 100 159 militants qui l'ont porté, l'an dernier, à la présidence du parti. Ils ont besoin d'être rassurés.

Le patron de LR promet que leurs voix compteront plus que celles des millions d'électeurs susceptibles de participer à la primaire. Ce sont eux, eux seulement, qui approuveront par référendum cet hypothétique «projet d'alternance» mûri «collectivement». Le plus drôle, c'est que celui qui célèbre ainsi «le collectif» se complaît dans une autocélébration débridée. La crise des migrants ? La tragédie syrienne ? La barbarie jihadiste ? En écoutant leur idole, les sarkozystes ont dû se dire que la planète n'en serait pas là si les Français l'avaient réélu. Inlassablement, Sarkozy dénonce l'absence de «leadership» sur la scène internationale depuis son départ : en 2012, son appel à une intervention en Syrie n'a pas été entendu et les modérés libyens ont été abandonnés à leur sort. «Je m'étais occupé de la Libye. Il fallait donc la laisser tomber», a-t-il osé au Touquet !

Si ses concurrents sont priés de cesser de réfléchir dans leur coin, Nicolas Sarkozy, lui, ne s'interdit rien. Suspension de Schengen, refus des quotas, «adaptation» du droit du sol… le chef de LR déroule un catalogue de propositions chocs qui n'ont rien de «collectives». Aucune n'a été validée ni même discutée par les instances du parti. Loin de s'effacer derrière sa fonction de garant de l'unité de la droite, Sarkozy est obsédé par sa propre candidature en 2017. Au point qu'un lapsus lui a échappé samedi. Il a confondu le Touquet avec le Bourget : la ville où Hollande prononça, en 2012, le discours qui devait le conduire à la victoire.