Menu
Libération
Billet

Quand Macron parle, qui parle?

Après la polémique ouverte par le ministre de l'Economie sur le statut des fonctionnaires, l'exécutif se désolidarise... tout en lui maintenant sa confiance.
Emmanuel Macron le 15 septembre à l'Elysée. (Photo Patrick Kovarik. AFP)
publié le 21 septembre 2015 à 14h09

Une nouvelle fois, Emmanuel Macron fait le buzz sur le dos de la gauche. Le ministre de l'Economie qui en janvier avait souhaité voir de jeunes Français «rêver de devenir milliardaires», le même qui cet été ravalait la réduction du temps de travail au rang des «fausses idées», s'en est cette fois pris au statut de la fonction publique, la jugeant «inadéquate». Comme à l'accoutumée, François Hollande et Manuel Valls se sont désolidarisés du propos. A chaque «dérapage» du ministre correspond donc un «recadrage» du couple exécutif, à la façon dont des parents attentifs excusent leur enfant turbulent. Au risque de passer pour irresponsables.

Qu'Emmanuel Macron se réclame publiquement d'idées repoussoir à gauche est une chose. Mais autre chose est de le laisser dire. Car enfin, François Hollande et Manuel Valls peuvent museler facilement leur poulain. Macron est un serviteur trop zélé pour ne pas se plier sans délai à une consigne de silence venue de plus haut. A l'enfreindre, il s'exposerait d'ailleurs à partager le sort de son prédécesseur, Arnaud Montebourg. Or rien de tel dans le cas du ministre de l'Economie à qui bien au contraire Président et Premier ministre renouvellent leur confiance à intervalle régulier – et cette fois encore. Un comble, l'unique semonce est venue de sa collègue du gouvernement, Marylise Lebranchu. Excédée par une polémique qui brouille ses négociations avec les syndicats de fonctionnaires, la ministre a invité Macron à «parler le moins possible».

Car quand Macron parle, qui parle? Un électron libre égaré dans un gouvernement socialiste? Un petit soldat chargé par ses supérieurs de tester l’opinion? Un ministre annonçant à mot couvert la réforme à venir? Personne ne le sait plus. On soupçonne, on suppute, on redoute. Qu’il ouvre la bouche, la gauche se trouble et le pays stresse. Que cette montée d’adrénaline soit le plus souvent inutile ne change rien à l’affaire: comment savoir gré à Hollande ou Valls de démentis qu’ils n’auraient jamais dû avoir à faire? L’image de l’exécutif qu’on dirait tiraillé entre ce qu’il voudrait et ce qu’il n’ose, en sort ternie. Sa crédibilité aussi.