La levée en masse ? Ce n'est décidément pas pour tout de suite. Quand la majorité des adhérents de l'UMP l'ont élu, fin 2014, à la présidence du parti, Nicolas Sarkozy a promis de mobiliser «une armée de militants». Objectif ? 500 000 adhérents en 2017 et près de 300 000 fin 2016. Avec «des ouvriers, des professeurs, des ingénieurs, des agriculteurs», ce nouveau parti, rebaptisé Les Républicains, devait être «le métro à 18 heures». Il n'en prend pas le chemin. Confirmant une information de France Info, le secrétaire général adjoint du parti Les Républicains (LR), Eric Ciotti, reconnaît une légère baisse des adhésions au cours de l'année écoulée. Au 15 septembre, LR comptait 178 920 militants contre 181 000 en septembre 2014.
Dans l’entourage de l’ancien chef de l’Etat, on s’efforçait mardi de minimiser la signification de ce chiffre. Il est vrai que, dans les partis politiques, le rythme des adhésions varie considérablement en fonction de l’activité électorale. L’an dernier, l’élection à la présidence du parti avait attiré de nombreux militants désireux d’arbitrer le match entre Sarkozy, Le Maire et Mariton. Rien de tel depuis le début de l’année. Selon Ciotti, les adhésions devraient donc repartir à la hausse d’ici la fin de l’année, grâce aux élections régionales qui seront suivies par le renouvellement de tous les présidents des fédérations départementales LR.
Mais même si ce pronostic mécanique devait se vérifier, les chiffres révélés par France Info confirment, au minimum, la faiblesse de l'élan et de la dynamique en faveur de Nicolas Sarkozy. Pour étouffer cette mauvaise nouvelle, l'entourage du chef de l'Etat a répliqué mardi que les raisons d'espérer ne manquaient pas. Le trésorier de LR, Daniel Fasquelle, révèle qu'avec 4,6 millions d'euros de dons reçus depuis le début de l'année, il est déjà un million au-dessus du total de l'an passé. Il note par ailleurs que dans un contexte «compliqué» pour toutes les formations, LR reste, de très loin, le premier parti de France, devant le PS (moins de 100 000 adhérents) et le FN (environ 50 000).
«Quand je me compare, je me rassure», lançait le numéro 3 de LR, Laurent Wauquiez, mercredi matin sur RTL. Contrairement à ses concurrents, le parti de Sarkozy promet une totale transparence sur le niveau des adhésions. La secrétaire générale adjointe chargée des adhésions, Sophie Primas, assure que le parti va «dès le mois d'octobre […] faire constater par huissier, chaque trimestre, son nombre d'adhérents. Les résultats seront communiqués de façon claire et transparente».
«Préjugés xénophobes»
Coïncidence malheureuse : les résultats décevants de LR sont révélés au moment où Sarkozy entreprend de passer à l'action pour asseoir sa supériorité de chef de parti sur ses concurrents, Alain Juppé, François Fillon et Bruno Le Maire. En faisant valider directement par les militants ses propositions sur l'immigration, l'ancien chef de l'Etat entendait démontrer que le projet du parti avait une légitimité bien plus forte que les programmes que les candidats à la primaire élaborent de leurs côtés. Les lieutenants de Sarkozy ont tous salué comme un très grand succès la mobilisation de 53 000 adhérents qui ont dit oui à plus de 90% à toutes les questions – souvent très vagues – qui leur étaient soumises. Interrogé par Libération, un cadre de l'ex-UMP tempère cet enthousiasme : il fait remarquer que sous le règne de Jean-François Copé, l'approbation par vote électronique des nouveaux statuts du parti avait mobilisé près de 100 000 militants. Manière de suggérer que la participation enregistrée la semaine dernière n'a rien d'exceptionnel.
De nombreux responsables de l'UMP avaient jugé au mieux «simpliste», au pire franchement «détestable», le questionnaire soumis aux militants sans consultation préalable du bureau politique. Le plus sévère étant l'eurodéputé juppéiste Alain Lamassoure, qui regrette que les questions posées soient «inspirées par la peur et la crainte des étrangers». «Le rôle d'un parti, qui se réclame du général De Gaulle et de la démocratie chrétienne, consiste-t-il à justifier tous les préjugés xénophobes ?» s'est-il interrogé.
Mardi soir, un débat sur ce questionnaire était à l'ordre du jour du bureau politique de LR. Mais l'explication orageuse n'a pas eu lieu. Alain Juppé s'est contenté de prendre la parole pour rappeler que «le projet conçu par Les Républicains ne saurait constituer une base à laquelle on demande à chaque candidat de souscrire». Il a ajouté que les candidats à la primaire n'étaient pas «candidats d'un parti», puisqu'ils ont vocation à rassembler tous les électeurs de la droite et du centre. Sarkozy a assuré qu'il était «sur la même longueur d'onde» et qu'il ne prétendait nullement que «tout le monde doive être d'accord sur tout». Il semble donc qu'il renonce à prétendre que le projet du parti «engage» les candidats à la primaire. C'est pourtant ce qu'il avait martelé le 12 septembre, au Touquet, devant les Jeunes Républicains.