Des écologistes qui accourent vers eux, les bras ouverts. Sur le papier, les socialistes auraient de quoi être enchantés. Face au refus d'EE-LV et du Front de gauche de faire alliance dès le premier tour aux régionales, leur premier secrétaire n'a-t-il pas proposé d'organiser un référendum pour appeler à l'unité de la gauche? Pourtant, en Ile-de-France, le rapprochement n'est pas si simple entre le PS et les écolos dissidents qui ont quitté EE-LV pour soutenir ouvertement le gouvernement.
«On verra si tu es un bon maçon»
Jean-Vincent Placé, qui dénonce la «dérive gauchiste» du parti qu'il a quitté fin août, a annoncé mardi qu'il quittait le groupe EE-LV avec 15 de ses membres (sur 51). Un beau renfort a priori. Mais l'équipe de Claude Bartolone semble loin de l'enthousiasme. Lors d'une rencontre, le président de l'Assemblée nationale aurait déclaré au sénateur de l'Essonne: «Construis ton mur et en fonction de la taille du mur, on verra si tu es un bon maçon.» Bref, il semble urgent d'attendre pour le candidat PS en Ile-de-France.
Pas question de fâcher Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale d'EE-LV et chef de file en Ile-de-France. D'abord parce que celle-ci se lance en solo et a refusé, dès l'été, de rejoindre le communiste Pierre Laurent et Eric Coquerel (Parti de gauche) comme l'y poussaient pourtant ses proches. Rien à voir avec le climat exécrable du Nord-Pas-de-Calais où les écologistes ont voté l'alliance avec le Front de gauche au premier tour. D'ailleurs les relations sont plutôt bonnes entre Bartolone et Cosse, chacun y ayant intérêt en vue de la fusion de leurs listes pour le second tour. «On ne fera rien pour mettre en difficulté Emma car on aura besoin d'elle le soir du 6 décembre», promet un proche du candidat socialiste.
Or Emmanuelle Cosse, silencieuse et spectatrice dans un premier temps, menace. Mercredi, quelques heures avant son meeting de lancement de campagne, elle a déclaré à l'AFP: «Ils se créent des problèmes alors qu'ils feraient bien de se battre pour que la région reste solidaire. Il y a moyen de mettre son énergie ailleurs....» Comprendre, le PS n'a pas intérêt à dealer avec la bande de Placé. Même ton chez David Cormand, le responsable des élections des écolos qui explique que si le PS «en profite pour intégrer les dissidents écolos dans leur liste, cela pourrait tendre nos relations. Et je ne vois pas l'intérêt des socialistes: tout le monde a à perdre dans cette histoire.»
«C’est la haine entre eux»
A Solférino, le cas des «Ecologistes!», parti tout juste lancé par Placé et De Rugy, embarrasse. Tout le monde s'accorde à dire que les deux présidents de groupe du Sénat et de l'Assemblée ont quitté les Verts trop tôt. «Le timing n'est pas bon». Une élue argumente: «Ils sont sortis c'est une bonne chose, ce sont des alliés mais aujourd'hui on ne sait pas quoi en faire.» Un élu de Seine-Saint-Denis confirme et ajoute: «On n'a pas intérêt a prendre Placé dans nos listes. Je ne sais pas ce qu'il a promis à ses camarades mais c'est pareil. On ne peut faire capoter notre alliance au second tour avec les écolos à cause de lui.» «C'est la haine entre eux», soupire un autre.
En revanche, pour d'autres responsables, la tentative d'approche de Placé, en ces temps de disette unitaire, ne peut guère se refuser. Ce mercredi matin, sur iTélé, le patron des députés PS, Bruno Le Roux à admis qu'il est compliqué de dire à des écologistes «qu'on veut l'union et la refuser quand ils viennent vers nous». Elu en Seine-Saint-Denis, il plaide pour «intégrer dès maintenant ceux qui veulent être avec nous pour faire cette campagne» mais dans le même temps, rendre l'union possible «avec ceux qui ne font pas campagne contre nous, qui font campagne à côté de nous».
Un autre député francilien refuse le critère du «poids électoral» des amis de Jean-Vincent Placé pour décider de les associer ou non. «Vous donnez un signal où vous n'êtes pas tout seuls. On ne sait pas combien l'ouverture rapporte mais on sait combien coûte la fermeture», met-il en garde. L'équipe de Claude Bartolone envisageait une conférence de presse fin septembre avec les «partenaires» du PS, les proches de Robert Hue, de Jean-Luc Laurent (MRC) et les radicaux de gauche. On verra alors si Placé sera parvenu à se glisser sur la photo.