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Libération

Elise, professeure militante

Enseignante d’histoire-géo à Epinay-sur-Seine, Elise Boscherel, 33 ans, a choisi de se confronter à des classes en difficulté.
par Mathieu Blard, Bondy Blog
publié le 25 octobre 2015 à 19h26

Elise Boscherel est professeure de français et d'histoire-géographie au lycée professionnel Louise-Michel d'Epinay-sur-Seine, en Seine-Saint-Denis. Cette femme blonde de 33 ans au regard décidé est venue à l'enseignement par la politique. Militante à l'Unef pendant ses études à Rennes, conseillère municipale à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) en 2008, candidate PS aux cantonales de 2011, fille de syndicaliste, elle avait tout pour devenir une apparatchik. Mais après la campagne, elle choisit un tout autre chemin. «Je ne voulais pas dépendre du parti, et je voulais faire du terrain.» Elle se présente au concours d'enseignement en lycée professionnel et demande Saint-Denis comme première affectation, pour «être avec les élèves les plus en difficulté». Elle se retrouve d'abord à Montreuil. Aujourd'hui, à Epinay, elle ne regrette rien : «J'aime mes élèves, c'est le plus beau métier du monde.» Pour autant, pas d'angélisme. L'éducation à deux vitesses, elle la vit au quotidien. «Je revois le présent de l'indicatif en terminale ! J'ai des élèves qui ont une écriture d'enfant de 8 ans. Ils sont à l'école depuis l'âge de 3 ans, que s'est-il passé ?» Elle admet que le corps enseignant a sa part de responsabilité : «Il y a des profs super engagés, mais d'autres qui n'ont rien à faire là. A Louise-Michel, certains font une sélection avant la classe en refusant ceux qui n'ont pas leur carnet de liaison. Résultat, des élèves passent leur scolarité en dehors des cours !»

Elle reconnaît que les conditions sont difficiles, elle est d'ailleurs déjà malade un mois après la rentrée. Pour enseigner en banlieue, il faut dépasser ses prérogatives : «J'ai des mômes qui décrochent par le deal. Il y en a un en ce moment pour lequel j'ai un doute, je vais l'appeler pour le voir, quitte à lui payer un verre. Si je ne le fais pas, qui va le faire ?» La politique du gouvernement lui semble pleine de bonnes intentions, mais réduite à des mesurettes. «L'éducation ne peut pas se réfléchir seule dans les quartiers populaires. On est en voie de ghettoïsation. Moi, dans mes classes, il n'y a pas de Blancs.»