Léa est ce qu’on appelle une élève modèle. Le genre de fille jamais en rupture de copies doubles, rarement absente, élue haut la main déléguée de classe. Le seul reproche que certains profs ont pu lui faire : le bavardage, ce qui ne l’a pas empêchée d’obtenir une moyenne de 15/20 de la sixième à la première. Bien avant l’année décisive du bac et de l’orientation post-bac, Léa, prévoyante, prend rendez-vous avec une conseillère d’orientation de son établissement, le lycée Marie-Laurencin, dans l’Essonne. Elle la revoit en première et encore en terminale. Sur le système d’affectation dans l’enseignement supérieur, elle obtient son deuxième vœu : une licence de «pratique de l’écrit», à Paris-VII. Tout va bien.
Le bac avec mention en poche, elle court s'inscrire à la fac. On lui indique alors qu'elle s'engage dans des études de… lettres modernes. «Pratique de l'écrit», c'était finalement une «mineure», soit trois heures par semaine, un semestre sur deux. Le reste du temps, ce sera aussi du latin, de l'ancien français, de la littérature comparée. En somme, un programme littéraire : «Je n'en voulais pas directement à ma conseillère parce qu'au fond c'est l'intitulé de la formation qui est mal foutu ; mais je ne comprends pas comment, elle qui est tout de même spécialiste de l'orientation, n'était pas informée.» Léa entame alors une procédure de réorientation. Le début des problèmes : «La fac c'est l'autonomie, d'accord, mais personne n'arrivait à répondre précisément à mes questions. Sur Internet, j'avais l'impression qu'on disait tout et n'importe quoi. J'étais totalement perdue.» Finalement, elle entame une nouvelle demande, en BTS communication.
En juin, douche glaciale : elle n'est acceptée nulle part. Les bacs technologiques sont prioritaires, lui dit-on. «Restez à la fac, vous y êtes bien, non ?!» Non, justement. Le choix se réduit : soit elle continue en deuxième année, soit elle arrête tout pour travailler au McDo. «Je m'ennuyais en cours, je voyais mes anciens camarades de lycée atteindre leurs objectifs, et moi je tournais en rond, c'était très compliqué psychologiquement.» Ce n'est qu'à la fin de cette seconde année à la fac qu'elle obtient enfin l'orientation souhaitée : un BTS communication (et un Deug en lettres modernes par la même occasion).