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Libération

Germain Ferey, 36 ans, tué au Bataclan

Germain Ferey, date indéterminée (Photo DR)
publié le 23 novembre 2015 à 18h56

«U», c'est le titre de la dernière photo postée par Germain Ferey sur sa page Facebook, le 13 novembre à 10 heures du matin. Une image très graphique, comme ce photographe et réalisateur aimait les faire. Domitille Ferey confie à Libération : «La compagne de mon frère nous a envoyé des messages vers minuit pour nous dire qu'elle venait de s'échapper du Bataclan, que Germain lui avait dit de courir et qu'elle l'avait perdu dans sa fuite. Elle s'est retournée et il n'était plus là. Nous pensons que mon frère a eu ce réflexe pour que leur petite fille de 17 mois ne soit pas orpheline. Nous avons cherché mon frère tout le samedi. Relayé les messages, appelé les hôpitaux, les numéros verts. Nous avons eu la confirmation du décès vers 16 heures le samedi. Et depuis, le temps se déroule si lentement...»

Né au Mans, et grandi à Vienne-en-Bessin, dans le Calvados, Germain Ferey avait 36 ans. Après des études de langues étrangères appliquées et un emploi dans une banque à Caen, il avait pris une autre voie, celle de la réalisation audiovisuelle, soutenu par ses parents. «J'ai toujours été fan de ce que faisait mon frère, se souvient Domitille. De son humour, du regard qu'il posait sur le monde, de ses dessins très personnels, qu'il griffonnait çà et là avec une facilité déconcertante, ses courts métrages, très complexes et poétiques et ses photos, pendant un moment très sombres mais très puissantes, puis par la suite plus axées géométrie et architecture. Il aimait beaucoup la musique, avait des goûts assez éclectiques mais très axés rock, pop-rock, rock alternatif, etc. Mon frère était un perfectionniste à l'extrême. Il a filmé et monté des films avec des sourds, des acteurs handicapés…»

Le quotidien Ouest-France a rappelé de son côté que Germain Ferey avait été correspondant au service sports de la rédaction de Caen entre 2001 et 2004, «où il collectait les résultats sportifs le dimanche soir». Le Normand vivait désormais à Paris, où il travaillait notamment pour le magazine en ligne du Jeu de paume, pour lequel il était en train de faire l'interview du réalisateur philippin Lav Diaz. Le musée parisien déplore la perte d'un «précieux collaborateur». Un de ses copains le décrit à Libération comme «une personne profondément bonne, qui aime la vie, une personne pleine de talents, notamment pour la photo et pour les relations humaines. Une belle personne dont je ne peux parler au passé».

Germain Ferey et sa femme étaient allés écouter Eagles of Death Metal en compagnie d'un autre couple. Son ami Antoine Mary, 34 ans, a également été tué, sa compagne blessée. «Nous sommes profondément sidérés, choqués, dit Domitille. Nous ressentons de l'injustice, une incommensurable tristesse. Mais les rires et l'innocence de sa fille seront précieux pour la suite. On va faire gagner la vie.»