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Reportage

De Nantes à Paris, à vélo contre vents et préfets

Notre-Dame-des-Landes, l'aéroport enterrédossier
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Parti de Notre-Dame-des-Landes samedi dernier, un cortège de militants écologistes tente de gagner la capitale.
Le cortège entre Saint-Corneille et Préau-du-Perche, mercredi. (Photo Isabelle Rimbert)
publié le 27 novembre 2015 à 19h46

«On a encore repoussé une frontière», se félicite une cycliste. Le préfet des Yvelines laisse passer le convoi. L'interdiction de rassemblement sur le bitume francilien recule un peu. Bonnet sur les yeux, gilet fluo, cette personne qui converge vers Paris l'a appris vendredi matin via les fonctionnaires du renseignement, omniprésents le long du cortège : «C'est la troisième volte-face des autorités. Chaque fois qu'on fait reculer les préfets, ça nous renforce. C'est très bon enfant. On rigole bien.»

Entre eux, le climat est au plus beau. Accompagnés de cinq tracteurs et d’une cuisine ambulante, 200 cyclistes, zadistes et paysans tiennent tous les soirs des assemblées pour envisager comment contourner ou braver les interdictions de progresser vers Paris. Le cortège, parti samedi dernier de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), et qui vise l’ouverture de la COP 21, a déjà traversé avec succès la pluie, la brume, les tracasseries de gendarmes et les interdits préfectoraux.

«On a trouvé risible l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir interdisant toute manifestation sur la voie publique du vendredi matin au lundi à minuit, juste au moment de nos passages», dit une porte-parole du groupe. Le document évoquait «des groupes et groupuscules appartenant à la mouvance contestataire radicale et violente». Le préfet a fait machine arrière mercredi matin, et le paisible convoi a passé son chemin, encadré par les forces de l'ordre, juste pour la circulation aux carrefours.

Dimanche, un bataillon de gendarmes mobiles avait déjà bloqué le défilé deux heures près d’Ancenis (Loire-Atlantique), exigeant des contrôles d’identité pour signifier à chacun l’interdiction de manifester en Ile-de-France. Refus unanime des cyclistes réunis en assemblée générale improvisée au milieu de la route avec, dans la foulée, une séance de yoga hilare. Finalement, un officier lira l’arrêté au mégaphone, laissant le cortège repartir d’un bon coup de pédale.

Si la COP 21 est visée pour dénoncer «l'hypocrisie du gouvernement qui s'apprêtait à venir nous expulser pour détruire des terres, le bocage, des zones humides», l'accent est aussi mis sur l'état d'urgence : «Pas question de se laisser museler. La ZAD est un espoir politique qui réinvente des manières d'habiter, de pratiquer l'agriculture.»

Partis d’autres lieux de mobilisation, contre l’enfouissement de déchets nucléaires à Bure ou contre l’expulsion de trois fermes maraîchères squattées à Dijon, les convois de l’Est et du Sud ont rejoint vendredi matin celui de l’Ouest. Le cortège a décidé d’entrer dans les Yvelines, accueilli par un agriculteur d’Emancé, le temps de fixer une stratégie pour s’approcher le plus près possible de Paris.