Le Front national n’est pas l’allié des travailleurs, qu’ils soient smicards, ouvriers, au chômage ou cadres. Au contraire, il pourrait, s’il prenait la tête de certaines régions, fragiliser leurs situations. A quatre jours du premier tour des élections régionales, tel est le message de la plupart des syndicats : il faut barrer la route à l’extrême droite.
La condamnation porte d'abord sur les valeurs distillées par le parti de Marine Le Pen. Soulignant les dangers qu'une «conception autoritaire de l'exercice du pouvoir» pourrait faire peser sur les libertés, l'Union nationale des syndicats autonomes (Unsa) invite ses syndiqués à choisir un candidat «parmi les listes se situant dans le cadre des principes démocratiques de notre République». Ce qui, précise le syndicat, «n'est pas le cas des partis – Front national, Ligue du Sud – dont le programme est basé sur la discrimination et la xénophobie». Même discours du côté de la Fédération syndicale unitaire (FSU) qui demande, dans un communiqué, de «voter et de faire barrage au FN». Et invite, de fait, les électeurs à «se positionner en faveur des valeurs laïques et humanistes de liberté, d'égalité, de fraternité, de solidarité et de justice sociale».
Les propositions du FN, qualifiées de «discours manipulatoire», sont aussi balayées d'une traite par le syndicat de la fonction publique. Il souligne ses «conséquences néfastes pour les missions de service public, pour les agents des services publics territoriaux mais aussi pour les usagers». Exemples à l'appui, la fédération des services publics de la CGT abonde : «En région Paca, dans le cadre de la campagne des régionales, Marion Maréchal-Le Pen prône le non-remplacement de départs en retraite de fonctionnaires territoriaux.» Ou encore : «A Hayange, la municipalité frontiste ne remplace pas les départs en retraite.» «A Beaucaire, elle remet en cause l'organisation du temps de travail du personnel communal. A Béziers, Fréjus et au Pontet, elle veut réduire les effectifs.»
Pour la CFDT, le programme du FN «aboutit à l'isolement et ne prend pas du tout en compte tous les défis que notre économie doit affronter». D'où l'appel de la centrale à «voter pour sa région, pas contre son voisin». La bataille se joue aussi au plus proche des électeurs. «Dans le Nord-Pas-de-Calais, les militants ont distribué 8 000 exemplaires d'une revue expliquant pourquoi le FN ne répond en rien aux enjeux posés par les élections régionales. Il y a un peu plus d'un an, au niveau national, nous avons aussi produit un argumentaire pour nos équipes pour contrer la montée du FN», explique Jean-Louis Malys, de la CFDT. Mais parler de ces sujets n'est pas toujours aisé dans les entreprises. «Certains salariés, déçus de l'offre politique, demandent : "C'est quoi l'alternative ?" Et nos militants ont parfois du mal à répondre», confie le syndicaliste.
Côté patronal, le Medef, en se basant sur un argumentaire certes différent, a aussi fait part de son hostilité à l'égard du FN dans les colonnes du Parisien. «Ce n'est pas un programme économique responsable, a souligné, mardi, Pierre Gattaz, le patron des patrons. Il n'est tourné ni vers l'avenir ni vers la compétitivité.» Dans sa ligne de mire, notamment : la fermeture des frontières. «Le monde attend la France et ce n'est pas en nous recroquevillant sur nous-mêmes que nous allons y arriver», a-t-il souligné.