Le FN arrive largement en tête dans la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie. Selon les résultats quasi définitifs (à 22 h 50), Marine Le Pen, avec 41,20 % des suffrages, est loin devant toutes les autres listes. Avec 25,04 %, Xavier Bertrand (LR) arrive deuxième et le socialiste Pierre de Saintignon finit troisième, à 17,67 %. Devant le risque d’une victoire du FN au second tour, le candidat PS a annoncé, en fin de soirée, le retrait de sa liste, suivant ainsi les consignes de la direction nationale du parti.
A 20 heures, pourtant, Saintignon espérait encore pouvoir fusionner avec la droite. «Personne ne peut avoir ce soir la prétention de gagner seul, expliquait-il. Nous devons trouver la solution pour continuer à développer notre grande et belle région. J'y prendrai toute ma part.» Quelques minutes plus tard, Bertrand appelait, lui, à «faire barrage» au Front national, mais en réponse au candidat PS, se présentait comme la «seule alternative possible contre l'extrême droite». Autrement dit, pas de fusion. Une position réaffirmée par Nicolas Sarkozy au niveau national. Avant de finalement «saluer» le retrait du PS en fin de soirée.
Pendant la dernière partie de la campagne, les socialistes et la droite s'étaient posé la question du barrage au second tour face au FN. L'hypothèse d'une liste commune PS-LR, avancée par Manuel Valls à l'époque, aucun des deux camps n'en voulait, et Saintignon avait appelé le Premier ministre à le «laisser travailler».
Le retrait ne règle pas tout pour autant. Même en cas de duel, presque tous les sondages ont jusqu’ici donné gagnante la candidate lepéniste face à la droite. La fusion de deux régions qui votaient fortement extrême droite a donné un résultat prévisible depuis les chiffres élevés des départementales : un FN en tête, avec un bonus pour la tête d’affiche du parti, plus star que candidate. Et la forte participation, 54,5 % - près d’une dizaine de points de plus qu’en 2010 -, a joué, comme à Hénin-Beaumont en son temps, au profit du FN : des citoyens qui n’osaient pas se déplacer s’autorisent désormais à voter pour voter à l’extrême droite. Cette région Nord-Picardie, la plus jeune, la plus pauvre, la plus en mauvaise santé et au chômage de France, le PS sortant a dû faire avec une gauche émiettée, une droite plutôt unie, un climat post-attentats et un ras-le-bol autour des migrants à Calais. Dans les villes où les migrants qui tentent de passer en Grande-Bretagne s’entassent, le FN fait de très gros scores. Plus de 50 % à Calais et 43 % à Grande-Synthe. Dans les villes bourgeoises comme Mouvaux, ou Marcq-en-Barœul dans le Nord, le FN est contenu autour de 20 %. Dans une commune populaire et sinistrée comme Denain, il monte à 48 %. A Hénin-Beaumont, Steeve Briois annonce un plébiscite à 60 %.
A Loos, dimanche après-midi, en banlieue populaire de Lille, à l'école Curie, Serge, cadre technique dans la santé, fils d'ouvrier, a voté FN. Il assure que ce n'est pas pour «appartenir à un parti d'extrême droite», mais pour «dire "stop" aux politiques». Il dit qu'il est plutôt «centriste», mais là, «ça suffit, faites gaffe quoi, pensez à nous, les ouvriers».