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Libération
Analyse

Répétition générale pour une France malade

Dernier scrutin avant la présidentielle de 2017, ces régionales mettent en évidence les échecs de la droite et d’une gauche désunie.
publié le 6 décembre 2015 à 21h48

La dernière photographie politique avant la présidentielle de 2017 fait apparaître une France… malade. Dont un seul parti, le Front national, peut légitimement revendiquer non seulement une victoire mais, surtout, et c’est le plus important, une dynamique électorale qui autorise Marine Le Pen à voir en grand ses espoirs pour 2017. Dimanche soir, Nicolas Sarkozy et François Hollande auront beaucoup de mal à voir dans ces résultats autre chose qu’une défaite pour leur camp et leur stratégie. La droite, unie, ne parvient toujours pas à capitaliser massivement sur le désamour à l’égard de l’exécutif et son absence de résultats, notamment sur le front du chômage. Quant à la gauche, même si le socle socialiste fait mieux que résister dans certaines régions, elle est toujours aussi affaiblie par sa désunion qui l’oblige à se retrouver en troisième position (la pire) dans six régions.

Crise de confiance. Un pays démocratiquement malade, donc. Car même si l'abstention (49,5%) a reculé de quelques points par rapport à 2010, elle reste très légèrement inférieure à celle des départementales de mars (49 ,8%). Le pays s'est finalement très peu déplacé pour aller voter, alors que tout l'incitait à le faire sur un mode dramatique. Ni la menace d'un Front national capable, selon les sondages, d'arriver en tête dans au moins six régions ni les appels du gouvernement à revendiquer son bulletin de vote comme «une arme contre le terrorisme» n'ont suffit pour remobiliser notamment le peuple de gauche. Le désenchantement démocratique français prend racine. Un pays malade car aucune alternative républicaine au Front national n'apparaît aujourd'hui comme une valeur refuge. Le bloc «total droite» dépasse tout juste les 30% alors que son homologue «total gauche» atteint environ 35%, à cause notamment d'un Parti socialiste qui fait mieux que prévu (d'au moins 3 points), probablement grâce au petit regain de mobilisation. Le grand pari de Nicolas Sarkozy a pour l'instant échoué : non seulement le parti Les Républicains n'a pas freiné l'envolée du vote frontiste mais, surtout, il ne profite que très peu de la crise de confiance qui frappe l'exécutif. Les résultats de dimanche n'apportent donc aucune réponse au vieux dilemne existentiel de la droite : pour contrer l'extrême droite, faut-il coller au discours du FN ou au contraire s'en détacher en réaffirmant le primat de l'économie ? Les partisans de Sarkozy pourront toujours dire que, sans leur champion, la situation aurait été bien pire. Ceux d'Alain Juppé professeront bien sûr exactement le contraire. Seule la future primaire tranchera la question.

Rassemblement. De cette non-victoire de la droite, la gauche aurait tort de tirer une réelle satisfaction. Certes, elle ne s'effondre pas. Certes, elle fait plus que résister dans plusieurs régions. Mais si on transpose ce premier tour sur celui de la prochaine présidentielle, il ne fait guère de doute que le candidat socialiste aura du mal à se qualifier pour le second tour. Hollande est aujourd'hui ce futur candidat d'un camp désuni, souffrant de plus en plus de son incapacité à se rassembler. Il reste à peine un an au Président pour tenter de reconstituer ce qu'il s'est appliqué à désaccorder pendant son quinquennat : prouver que le rassemblement de la gauche a une efficacité électorale et un sens politique.