Cinq ans de prison. C'est ce qu'encourt la personne qui, samedi, a glissé un objet dans les toilettes du vol AF463 devant relier dans la nuit de samedi à dimanche l'Ile Maurice à Roissy ; un assemblage composé d'un minuteur et de cartons rectangulaires reliés par un adhésif et des pinces métalliques. Le commandant de bord avait décidé, après avoir été alerté par une hôtesse, de dérouter l'avion vers l'aéroport le plus proche, en l'occurrence Mombasa, au Kenya. L'objet, récupéré par les services de déminage kényans, s'est avéré être une bombe factice. «Un acte de malveillance» avait immédiatement dénoncé le PDG d'Air France Frédéric Gagey ou «quelque chose qui s'apparenterait à une mauvaise plaisanterie». Parmi les passagers rapatriés lundi matin, un policier à la retraite âgé de 58 ans a été interpellé par la Police des frontières et immédiatement placé en garde à vue. Une enquête a été ouverte par tribunal de Bobigny, pour «faits d'entrave à la circulation des aéronefs et mise en danger de la vie d'autrui». Lundi soir, l'homme a été relâché. Ce qui ne signifie pas qu'il est hors de cause. Mais seulement que «l'état actuel des investigations ne justifie plus le maintien de la garde à vue», a précisé le parquet de Bobigny, qui «poursuit son enquête».
Une farce qui peut coûter jusqu'à 18 000 euros d'amende
Pour la première infraction, l'entrave, la personne poursuivie risque donc cinq ans de prison et 18 000 euros d'amende. Cette infraction inscrite dans le code des transports couvre plusieurs délits : entrave à la circulation des aéronefs (avions, hélicoptères, montgolfières...), mais également dégradation des bâtiments ou des autres moyens de communication destinés à en assurer le contrôle. La destruction ou la dégradation d'un appareil dans un aérodrome est également condamnable. Enfin, quiconque tente de bloquer le fonctionnement d'un aérodrome, à l'aide d'une arme ou de toute autre substance, s'expose à des poursuites de même nature. Pierre-Emmanuel Neurohr est un habitué des «faits d'entrave à la circulation des aéronefs» sur un aéroport. A cinq reprises, ces dernières années, ce militant écolo qui dénonce «la destruction du climat» s'était introduit sur le tarmac de Roissy afin d'empêcher un avion de décoller. Il avait écopé en 2014 de deux mois de prison.
Evacuation par les toboggans
L’autre fait retenue, la «mise en danger de la vie d’autrui», est moins sévèrement punie : un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende. C'est d'ailleurs l'objet de la plainte déposée lundi matin par Air France, en raison des mesures d’urgence prise suite à la décision du commandant de bord de bifurquer vers le Kenya. L’équipage a suivi les consignes qui s’appliquent en cas de découverte d’un objet suspect. Le Boeing est notamment descendu rapidement de 10500 mètres à moins de 3000 mètres (afin de réduire les effets de la déflagration en cas d’explosion) et l’équipage a ensuite procédé à une évacuation par les toboggans. Une prise de risque potentiellement dangereuse pour les passagers et l’équipage.
Selon les développements de l’enquête en cours, la plainte pourra être requalifiée. Est-ce que, par exemple, la personne qui a posé l’objet est la même qui a alerté l’hôtesse ? Dans ce cas, la fausse alerte pourra retenue. Cette infraction, détaillée dans l’article 224-8 du code pénal, prévoit une peine de cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende, pour quiconque communique «une fausse information, de compromettre sciemment la sécurité d’un aéronef en vol ou d’un navire».
Il existe une autre infraction également inscrite dans le code pénal et liée à la fausse alerte : elle ne s’applique pas seulement aux avions, mais est plus précise dans son intitulé : est puni de deux ans d’emprisonnement et 30000 euros d’amende quiconque «communique ou divulgue une fausse information dans le but de faire croire qu’une destruction, une dégradation ou une détérioration dangereuse pour les personnes va être ou a été commise.» Là encore, en fonction de l’enquête, ce sera au juge de qualifier au mieux la plainte.