Le grand projet de l'université Paris-Saclay, lancé par Sarkozy et repris tel quel par Hollande va-t-il exploser en vol ? Un vrai gâchis se profile. La semaine dernière, trois ministres - Jean-Yves Le Drian (Défense), Thierry Mandon (Enseignement supérieur) et Emmanuel Macron (Economie) - étaient présents au Conseil d'administration de l'Ecole polytechnique. Et leurs annonces ont mis le feu aux poudres. L'enjeu principal de ce projet réside dans la manière dont les grandes écoles, et singulièrement l'X, seront intégrées à ce mégacampus de Saclay dont la matrice et les forces dominantes sont l'université Paris-Sud (Orsay pour l'essentiel) et les laboratoires mixtes universités/CNRS qui en constituent la force de frappe scientifique. Depuis le début, les grandes écoles résistent à cette intégration, alors que leur modèle de formation des «élites» est mis en question. Or, voilà ce que les trois ministres leur ont dit en substance : rassurez-vous, nous ne vous obligeons à rien et surtout pas à frayer avec les universitaires et chercheurs, nous vous proposons même de récupérer certains des meilleurs lycéens dès après le bac et nous ajoutons même 60 millions d'euros en cinq ans à l'X (une des formations les mieux financées). Ces annonces ont été prises comme une provocation par la communauté scientifique et universitaire d'Orsay. Non sans raison. Des boîtes mails et des téléphones en surchauffe depuis vendredi est sorti un texte signé par des scientifiques de haut niveau dont Albert Fert, Prix Nobel de physique, et Wendelin Werner, lauréat de la médaille Fields. Dans cette lettre au gouvernement, ils disent stop ! Et accusent celui-ci de vouloir «faire de l'université Paris-Saclay un assemblage hétéroclite d'institutions au sein duquel chacun gardera son autonomie sans gouvernance forte et sans visibilité internationale». Le système actuel a pourtant montré son incapacité à former des ingénieurs innovants, continuons donc dans la même voie, celle de l'échec, s'indignent-ils. Mais ce gouvernement est-il capable d'écouter ses plus fervents soutiens, les universitaires et scientifiques, pour tourner le dos à la politique débutée sous Sarkozy ? Bref, de rompre avec le mépris de ce dernier pour l'université et la recherche ?
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