Lettre ouverte d’un Franco-Burkinabé au président François Hollande
Né en France en 1936 de parents apatrides ayant quitté l’Allemagne en 1933, j’ai été naturalisé français à la naissance en fonction du droit du sol que Marine Le Pen veut abolir pour ne maintenir que le droit du sang.
En 1987 j’ai découvert l’Afrique en arrivant au Burkina Faso. J’y ai rencontré le président Thomas Sankara juste avant son assassinat. Je me suis attaché à ce pays et y travaille avec les associations qui prennent en charge les exclus et oubliés du système éducatif que la France y a exportés.
Ce travail m’a permis de recevoir en récompense la citoyenneté burkinabé, celle-là je l’ai choisie et voulue. Vous comprendrez alors ma première indignation.
Tous les arguments ont été avancés contre cette mesure absurde qu’est le retrait de la nationalité française pour les terroristes binationaux car eux, c’est sûr, ils n’en n’ont rien à cirer de leur passeport français qu’ils brûlent souvent, mais par contre cette mesure instaure une coupure entre ceux qui seraient les vrais Français et les autres dont je fais partie.
Si je me permets de vous écrire c’est que j’ai voté pour vous aux primaires de la gauche et aux présidentielles qui ont suivi.
Je suis un traumatisé des élections présidentielles de 2002 où Jospin avait été éliminé au premier tour. Moi j’avais voté pour mon ami Noël Mamère, depuis j’appelle mes amis à voter pour le candidat qui a une chance d’être présent au deuxième tour. Je l’ai fait pour Ségolène, j’avais même pris à plus de 70 ans et pour la première fois de ma vie une carte du PS, mais c’était un contrat à durée très déterminée.
J’ai recommencé pour vous avec quelques petites illusions non pas sur le plan économique, je sais que les choses sont compliquées dans ce domaine (mais un peu plus de Stiglitz et de Piketty m’aurait bien fait plaisir). Ceci dit les déclarations de Macron dans ce domaine me choquent moins que vos déclarations sur la nationalité.
J’espérais l’instauration de la proportionnelle aux élections que vous aviez promise et qui ne coûte rien; j’espérais l’instauration du droit de vote aux élections locales pour les résidents étrangers; le vieillard que je suis, 80 ans l’an prochain, espérait aussi une vraie loi permettant de mourir dans la dignité. Tout ça ne coûtait rien.
J’arrête là mes espérance déçues, malgré ces déceptions et bien d’autres, dans le domaine de l’écologie par exemple, j’aurais revoté pour vous en 2017 regrettant que vous refusiez une primaire de la gauche, au moment où la droite reprend cette idée.
Mais là, non c’est fini. Non seulement vous allez perdre les élections présidentielles mais nous risquons de nous retrouver dans un face à face Sarkozy-Marine Le Pen. Je ferai tout pour l’éviter, j’appelle donc tous mes amis à participer aux primaires de la droite et à voter pour Juppé, en tout cas au deuxième tour de ces primaires. S’il n’y a pas de danger, je me ferai plaisir en votant pour mon amie NKM au premier.
Ainsi pour la première fois de ma vie, à 80 ans, je voterai à droite sans hésitation.
Je vous en veux monsieur le Président de me mettre dans cette situation mais c’est ainsi, pour moi Hollande c’est fini.
Gabriel Cohn-Bendit, intermittent du spectacle politique, enseignant en retraite
PS : pourquoi n’instaurez-vous pas que, pour être candidat à la présidentielle, il faut être né en France comme c’est le cas aux Etats-Unis. Vous nous débarrasseriez de Valls comme candidat à la présidence de la République.