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Libération
EDITORIAL

Convaincre

Publié le 03/01/2016 à 19h31

Comment faire gagner la gauche dans une société qui évolue vers la droite ?

A ce casse-tête auquel se heurtent tant de partis progressistes en Europe, l'exécutif a trouvé une réponse : il triangule. C'est-à-dire qu'il mène une politique dont la teneur sociale-libérale ou sécuritaire place l'opposition en porte-à-faux, contrainte de rallier le gouvernement ou de se dédire. Le calcul, un brin cynique, paraît efficace. Sarkozy patine, Juppé mouline, Fillon s'obstine. Alors que le camp conservateur devrait profiter à plein des mécomptes de la lutte pour l'emploi, il se divise et peine à mobiliser ses électeurs. Valeurs actuelles soi-même, l'hebdo de la droite dure, sonne le tocsin en couverture : «Au secours, Hollande revient !» Mais l'habileté ne suffit pas. Il s'agit aussi d'identité politique. Pour rétablir la situation de la gauche, il faut donner à ses électeurs des raisons de la soutenir. Et donc sortir de la pénible affaire de la déchéance de nationalité par des amendements judicieux. Et surtout démontrer que les électeurs de gauche ont eu raison de se mobiliser en 2012. La «sécurité sociale professionnelle» mise en œuvre par étapes, réforme dont on sous-estime souvent la portée - et qui met en rage le Medef -, apporte une première réponse. Les droits sociaux qu'on peut accumuler dans un compte personnel, idée de la CFDT et de la CGT à l'origine, permettent d'atténuer les duretés d'une économie mondialisée qui oblige les travailleurs à changer d'emploi plus souvent. Accompagnée d'une généralisation de la couverture santé, elle montre que l'Etat-providence reste un pilier de la société française. Cela suffira-t-il ? D'autres avancées seraient bienvenues, qu'il s'agisse de pouvoir d'achat, de croissance verte, de formation des jeunes ou de lutte contre les inégalités. Avant d'avoir un projet, il faut un bilan. Il reste six mois pour convaincre.